Gantry 5

 

N° 910 29/01/2025  Gaza : le retour des réfugiés
Sur les réseaux sociaux circulent des images de la foule palestinienne en marche pour rejoindre le Nord de la Bande de Gaza. Les habitants, chassés par les génocidaires, rentrent chez eux. C’est la première fois, depuis 1948 que des Palestiniens peuvent ainsi retrouver leur lieu de vie.
Et pourtant, ces lieux de vie ont été détruits. Sur France Culture qui, comme la plupart des media français, découvre le réel après la bataille, une journaliste parle de Jabalya : « un paysage dystopique[1] » ; au milieu « des ruines et débris parmi lesquels on retrouve des munitions dangereuses qui n’ont pas encore explosé et des restes humains […], ce ne sont pas les seules images insoutenables ».
Sur place, ceux qui sont restés ont préparé des camps de tentes pour accueillir leur famille ou leurs voisins de retour. Certains occupent leur maison plus ou moins en ruine. On manque d’eau, de bois pour se chauffer, de tentes, même. Pourtant, rien ne pourra empêcher ces Palestiniens de rentre chez eux. C’est leur terre, c’est leur lieu de vie, c’est leur décor, ils ne lâcheront pas.
Voilà une nouvelle expression de la capacité de résistance du peuple palestinien, qui fait l’admiration des peuples du monde entier.
 
Cisjordanie : les sionistes à l’assaut de Jénine
Obligés de se retirer, au moins en partie, de Gaza, obligés de mettre le génocide en pause, les sionistes s’attaquent à la Cisjordanie. Ils ont d’abord raflé, dès lundi 20, une centaine d’habitants, dont ceux du village de Azzun, dans le Nord. Et puis, ils ont pris le relais des forces de l’Autorité Palestinienne collaborationniste contre le camp de Jénine. Bombardements, drones, tireurs d’élite (une fillette de deux ans a été tuée d’une balle dans la tête), le scénario de Gaza se met en place. Les alentours de l’hôpital ont été complètement défoncés pour en empêcher l’accès. Et de nouveau, pour la énième fois, le spectacle sidérant des bulldozers détruisant les infrastructures du camp de réfugiés.
Le Monde essaie de nous vendre que l’armée d’occupation agirait pour empêcher que les supplétifs de Ramallah puissent prendre le contrôle du camp : « En intervenant massivement dans une zone théoriquement sous contrôle palestinien, même s’il ne relève plus que de l’illusion, Netanyahu montre en effet qu’il est déterminé à empêcher par tous les moyens que l’Autorité palestinienne puisse jouer le moindre rôle à l’avenir. ».
Cela permet de cacher le vrai but du gouvernement colonial : poursuivre l’annexion et l’éradication des Palestiniens. Il n’est évidemment pas question qu’Abbas et les siens jouent le moindre rôle le jour d’après. D’abord parce que le peuple palestinien lui-même n’en veut pas. Il est avec les habitants et les résistants armés du camp de Jénine contre les forces assaillantes, que ce soient les forces spéciales d’Abbas ou l’armée d’occupation. Ensuite, parce que Netanyahu ne veut pas de jour d’après.
Si l’armée sioniste génocidaire effectue le travail, c’est bien par ce que les supplétifs de Ramallah ont été incapables de vaincre la Résistance armée à Jénine.
La concomitance de ces faits avec le cessez-le-feu à Gaza et la prise de fonction de Trump n’est pas un hasard. Il est bien possible que des gages aient été donnés aux colons et à l’armée d’occupation avec le feu vert à toutes les exactions et crimes possibles. Le président US a récemment pris la décision d’annuler les poursuites contre les colons coupables d’exactions et de crimes en Cisjordanie. C’est une décision seulement symbolique, car Biden n’en avait pas beaucoup mis à l’index. Mais le message a été reçu par Netanyahu et tous les sionistes. L’objectif est de détruire le camp, or c’est une œuvre de longue haleine. Ce qui n’a pas fonctionné à Jabalya, malgré les destructions pourrait bien ne pas fonctionner non plus à Jénine. Une chose est certaine en tout cas, la Résistance se défend et se défendra.
 
En France, toujours le discours officiel
La récente sortie du président US, Trump sur le nettoyage ethnique (déporter les Gazaouis vers l’Egypte et la Jordanie) fait partie des nombreux propos pour lesquels il y a loin de la coupe aux lèvres. Nul doute qu’ils reflètent la volonté de l’ensemble des sionistes qui rêvent, et ce, depuis 1948, d’être enfin débarrassés des Palestiniens.
L’effet principal de ces déclarations est de libérer encore plus la parole en France, des sionistes et de leurs partisans, si tant est qu’il soit possible qu’elle se libère un peu plus. Ainsi, le 21 janvier, le sioniste Philippe Karsenty donne ses arguments pour le génocide au micro de Radio-Shalom: « Le mythe de l’État palestinien c’est fini ! […] Tant que les arabes n’auront pas capitulé, il ne pourra pas y avoir de paix au Proche-Orient […] Tout le monde a compris que le peuple palestinien n’existe pas, tout le monde a compris que l’État palestinien n’existera pas. ».
Pourtant, on sent nos journalistes et manœuvriers en tous genres au service des colonialistes inquiets que la vérité ne se fasse jour. Il est en particulier essentiel pour eux que personne ne sache qui sont vraiment les captifs libérés par l’entité sioniste. Tel éditorialiste de BFM TV nous dit que ce ne sont pas des prisonniers politiques mais des terroristes ayant commis « des attentats suicides » (sic). On en déduit que Netanyahu libère des suicidés. On ne trouve personne pour nous dire que la plupart sont des prisonniers kidnappés par l’armée d’occupation, traînés dans des geôles sans jugement, sans visite de la Croix Rouge, souvent même sans avocat et qu’ils subissent la torture.
Ainsi, par exemple, les femmes libérées le 20 janvier sont pour la plupart étudiantes, mais aussi professeures, avocates, journalistes, secouristes, militantes. Parmi elles, Khalida Jarrar, militante du FPLP, députée, emprisonnée pour la 5ème fois, arrêtée et en détention administrative en décembre 2023, placée à l’isolement depuis 6 mois. Plusieurs d’entre elles, avaient déjà été libérées lors de l’accord de novembre 2023 et réarrêtées depuis.
Rappelons que plus de 12.000 Palestiniens ont été arrêtés par les sionistes depuis le 7 octobre 2023 à Gaza et en Cisjordanie (dont Jérusalem-Est) en prévision de ces échanges. Au 7 janvier, Israël détenait dans ses prisons 10.400 prisonniers, dont 3.476 en détention administrative (sans procès, ni qu’aucune charge ne soit communiquée), 320 enfants et 88 femmes. Enfin, ces chiffres ne prennent pas en compte les milliers de Gazaouis kidnappés, encore détenus dans des camps militaires israéliens. Le nombre de disparus ou de morts n’est pas connu.
 
Un cas particulier : incident sur France Info
Et voilà qu’un drame se produit sur France Info TV. Un bandeau a circulé l’espace de quelques minutes en commentaire de la deuxième vague de libérations de captifs des sionistes, évoquant 200 otages palestiniens. C’est le mot otage qui, bien entendu, a soulevé le cœur de tous les « bien-pensants ». France Info s’est fendue, très vite d’une pitoyable lettre d’excuse, assurant que le responsable de l’erreur avait été suspendu. Au passage, on apprend les liens étroits de Muriel Attal, directrice de la communication du groupe France Télévision, et la sioniste en chef des plateaux TV, la députée macroniste Caroline Yadan, bien connue pour ses sorties racistes. Muriel Attal répond du tac au tac à l’alerte de l’offusquée du terme « otage » : « On a immédiatement réagi Caroline. La direction de l’Info et de FTV ont été des Lucky Luke », lequel Lucky Luke est connu pour tirer plus vite que son ombre. Et la députée de dire « très bien, maintenant il faut licencier le fautif ».
Le pire est la réaction de la société des journalistes de France Info : « Ce samedi, un titre inexact a été diffusé brièvement sur notre antenne indiquant la libération de 200 otages au lieu de 200 détenus dans le cadre d’un échange entre 4 otages israéliennes et 200 prisonniers palestiniens. Cette erreur résulte d’une confusion humaine dans la rédaction du texte. La DSJ de France Info regrette profondément cet incident et reconnaît l’importance de la précision dans le traitement de l’information, particulièrement dans un contexte aussi sensible. Nous saluons la réactivité de la direction et nous présentons, au nom de toute la rédaction, nos plus sincères excuses à nos téléspectateurs. Cet incident, bien que regrettable, ne reflète pas les valeurs fondamentales de notre rédaction : son indépendance, sa neutralité et son exigence de rigueur journalistique. ». On comprend que des militaires israéliennes, donc prisonnières de guerre selon le sacro-saint droit international sont des otages, mais que des militants palestiniens kidnappés, détenus sans jugement et torturés sont des prisonniers. Il aurait été plus court et plus simple de dire : « Il faut dire otage israélien et prisonnier palestinien ». Quant à l’indépendance de la rédaction, on la voit bien dans sa soumission au discours dominant et ses liens étroits avec la députée sioniste. Nous n’avons pas souvenir d’une enquête avec rigueur journalistique sur les captifs palestiniens : d’où viennent-ils ? Quelles sont les circonstances de leur arrestation, de leur détention ? Que leur reproche-t-on ? Ont-ils été jugés ? Manifestement, tout cela ne fait pas partie du métier de journaliste selon la société de ceux de France Info.
 
En conclusion
Plus que jamais, Il faut continuer à exiger la vérité dans le traitement de « l’information » autour du conflit colonial de Palestine. Il ne faut pas laisser sans réponse la propagande de la classe dominante qui soutient le prolongement organique de l’impérialisme occidental qu’est l’entité sioniste.
Et il faut continuer d’exiger le retrait total des forces d’occupation et de colonisation de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem. Mais, cela ne saurait suffire.
Une paix juste, c’est le démantèlement des colonies, le retour des réfugiés et un Etat palestinien indépendant. L’existence d’un Etat colonial empêche une telle paix. Les travailleurs d’Israël ne peuvent être libres s’ils ne rompent pas avec le sionisme et continuent de se trouver objectivement dans le camp des colonisateurs. La solidarité avec la Palestine ne peut se contenter de phrases générales sur la paix. Il faut un Etat où tous les habitants jouissent des mêmes droits et puissent vivre ensemble, quelle que soit leur origine, en l’occurrence, un État palestinien démocratique. De même, la lutte de libération nationale du peuple palestinien n’a pas besoin de compassion, mais d’un réel soutien politique et d’actions de solidarité internationaliste. Et pour la France, où les Révolutionnaires, comme ailleurs, doivent combattre d’abord leurs capitalistes, cela commence par la lutte politique contre le soutien de l’impérialisme français à l’État colonial sioniste.
Le Parti Révolutionnaire Communistes, après la trêve et la poursuite du massacre en Cisjordanie, soutient plus que jamais les revendications fondamentales du mouvement de libération nationale palestinien : fin intégrale de l'agression militaire sioniste, droit au retour des réfugiés et formation d'un État palestinien sur le territoire de la Palestine mandataire.
[1] de Dystopie : selon le Robert, récit de fiction qui décrit un monde utopique sombre. 1984, de George Orwell, est une dystopie.