Gantry 5

 

N° 891 18/09/2024  Un journal sioniste obligé de démentir ses mensonges
C’est Le Monde, peu connu pour dénoncer les mensonges de la propagande sioniste qui nous le dit : « Le "Jewish Chronicle", plus vieux journal juif du monde, reconnaît avoir publié de fausses informations sur la guerre à Gaza. La direction a écarté un journaliste de cet hebdomadaire basé à Londres, soupçonné de distiller des "fake news" qui légitimaient la position du premier ministre israélien face au Hamas. ».
On apprend donc que la direction du journal a conclu une enquête approfondie concernant le journaliste indépendant Elon Perry, qui a démarré après que des allégations ont été formulées sur certains aspects de son travail. On apprend aussi, au passage, que le dénommé Perry a servi dans l’armée sioniste d’occupation. Le journal a donc décidé de supprimer les articles de Perry de son site web et de cesser toute collaboration avec lui.
Quels mensonges a-t-il donc colportés ? Elon Perry a tout récemment signé une série de scoops, dont l’un, le 5 septembre, s’appuyant sur des « sources venues du renseignement israélien », détaillant un supposé plan du chef du Hamas, Yahya Sinouar, pour s’échapper de la bande de Gaza par le corridor de Philadelphie, situé le long de la frontière entre Gaza et l’Egypte. Cette pseudo information permettait à Netanyahu de justifier sa position pour le maintien de l’armée d’occupation dans ce corridor, alors qu’il était, sur ce point, en grande difficulté en Israël, puisque même son ministre de la Défense avec beaucoup d’autres préconisaient, dans la négociation avec la Résistance palestinienne, de quitter l’axe de Philadelphie afin de parvenir à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu et de libération des captifs détenus à Gaza.
Les affirmations d’Elon Perry ont été considérées comme sans fondement par un porte-parole de l’armée, Daniel Hagari. Et ce n’est pas la première fois que l’on trouve, ici et là, des informations fabriquées sur la stratégie du Hamas, visant à dire que la recherche d’un cessez-le feu ne serait pas une priorité pour la Résistance palestinienne. A tel point que le magazine israélien "+972" avance même la thèse d’une campagne pro-Netanyahu. Il cite, nous dit Le Monde, « le très expérimenté journaliste Shlomi Eldar qui n’hésite pas, sur X, à pointer des fuites venues directement du cabinet du premier ministre israélien pour influencer la presse étrangère ».
Jenny Manson, coprésidente de l’association Jewish Voice for Labour (une organisation de Britanniques juifs défendant la cause palestinienne), juge « très choquant » que le Jewish Chronicle ait pu publier de telles fausses informations. Elle n’est pour autant pas surprise : « Je suis juive laïque, de gauche, et très fière de mes racines juives. Le "Jewish Chronicle" fut un journal très longtemps respecté par ma famille. Mais sa dérive à droite a commencé il y a déjà des années, et elle est devenue criante, quand le journal a multiplié les accusations d’antisémitisme contre Jeremy Corbyn », témoigne au Monde Jenny Manson. Pour mémoire, la position propalestinienne de l’ancien leader du Parti travailliste lui avait attiré les foudres de la presse, des plus vendus aux capitalistes de ses camarades, qui avaient utilisé l’arme fatale du détournement de l’antisémitisme et obtenu ainsi la démission de Corbyn.
Enfin, mauvaise nouvelle pour le journal sioniste, Le Monde nous apprend que : « Dimanche 15 septembre, quatre des contributeurs les plus connus du journal ont démissionné pour protester contre la publication des informations fabriquées. ». Des media français, à commencer par LCI et BFM, porte-parole les plus engagés de la propagande sioniste, ont relayé ces fausses affirmations. Manifestement, ils n’ont pas encore réagi aux nouvelles apportées par Le Monde.
Dans les pays impérialistes occidentaux et en particulier en France, le relais de la propagande sioniste est continu, ainsi, par exemple, aucun journal ou medium radiotélévisé de France n’a abordé les éléments de doute, fournis notamment par Haaretz, sur la version officielle du déroulement de la journée du 7 octobre 2023. Aucun n’a mentionné la « procédure Hannibal » ; quand aux accusations concernant des bébés rôtis ou des viols, elles n’ont jamais été démenties et certains les véhiculent encore sans l’ombre d’une preuve. Néanmoins, l’évolution de la situation, le fait que de plus en plus de gens se rendent compte qu’un génocide se déroule sus nos yeux, permet de lever des coins du voile. L’affaire du Jewish Chronicle, à cet égard, est exemplaire.
 
Rencontre entre le FDLP et le Hamas à Gaza
Les organisations gazaouies du Hamas et du FDLP (Front Démocratique de Libération de la Palestine) se sont rencontrées il y a quelques jours dans la Bande de Gaza. Cette rencontre est intéressante à plusieurs titres. D’abord, les deux organisations, qui ont participé à l’attaque du 7 octobre et, depuis, à la Résistance armée à l’assaut génocidaire de l’armée d’occupation, ont pu se réunir dans Gaza, ce qui en dit long sur la soi-disant maîtrise de la Bande par l’armée sioniste. Ensuite, contrairement à leurs frères du FPLP (Front Populaire de Libération de la Palestine), les militants du FDLP n’ont pas suspendu leur participation aux instances de l’OLP ; ce sont donc des représentants de la deuxième organisation constituant l’OLP (après le Fatah) qui ont rencontré ceux du Hamas, cela en dit long, et la déclaration commune le confirme, sur les perspectives d’union de la Résistance palestinienne. Voici quelques extraits de la déclaration commune.
« La résistance est un droit légitime de notre peuple, reconnu par toutes les normes et conventions. L’opération Déluge d’Al-Aqsa est le résultat naturel de la confrontation de notre peuple et de sa résistance à l’agression continue contre nos droits et notre patrie, ainsi qu’aux pratiques de l’occupation et de ses colons extrémistes. La résistance restera présente aussi longtemps que la Palestine sera occupée.
Le lendemain de la guerre sera déterminé par le peuple palestinien, car il détient le droit et l'autorité exclusifs en la matière, avec toutes les factions nationales autour de la table. Nous affirmons qu'aucun accord avec l'occupation sioniste ne sera conclu à moins qu'il ne réponde aux exigences de notre peuple, qui incluent l'arrêt de l'agression globale, le retrait complet de la bande de Gaza, la levée du siège, la reconstruction et la conclusion d'un accord sérieux d'échange de prisonniers.
La mise en œuvre de l'Accord de Pékin et des accords antérieurs est une étape nécessaire pour reconstruire le système politique palestinien et réformer et développer l'Organisation de libération de la Palestine afin qu'elle puisse reprendre son rôle naturel dans la conduite du peuple palestinien vers la réalisation de nos aspirations à la liberté à l'indépendance, à la création d'un État, et la libération. ».
Nous avions insisté sur le caractère porteur d’avenir de l’Accord de Pékin. Cette rencontre le confirme. Les Palestiniens de Gaza résistent et le long chemin vers l’unité de la Résistance se raccourcit.
 
Les raisons du conflit sont de plus en plus claires, cela porte des éléments d’espoir
Nous l’avons dit depuis le début de la reprise de la guerre. Nous sommes face un une guerre coloniale qui dure depuis plus de 75 ans, depuis la Naqbah de 1948. Il s’agit d’une colonisation de peuplement : le projet sioniste ne consiste pas à s’installer en Palestine et exploiter les indigènes comme la France en Algérie, mais à chasser les Palestiniens de leur patrie, de voler leurs terres et leurs maisons et de tuer tous les récalcitrants.
L’un des outils idéologiques utilisés durant ces 75 ans pour nier cet état de fait a été l’invisibilisation des Palestiniens, la négation même de leur existence. Le slogan initial des sionistes « Un peuple sans terre pour une terre sans peuple » recélait déjà la volonté de tuer ou de chasser les Palestiniens.
Lorsque Ariel Sharon, en 2005, a démantelé les colonies de Gaza, il s’est fait traiter de traître, en Israël, parce qu’il « s’en allait ». Il répondait systématiquement : « Nous devons finir le travail que Ben Gourion a laissé inachevé en 1948. ». Elias Sanbar, historien et poète palestinien, ancien membre de la délégation palestinienne qui négocia les Accords d’Oslo, proche d’Ibrahim Souss[1] et de Yasser Arafat, éclaire le sens de cette phrase, dans une prise de parole effectuée dimanche 15 septembre : « Qu’est-ce qui n’était pas fini en 1948 ? Le fait que tous les Palestiniens n’étaient pas passés à l’absence. L’enjeu était que nous devenions un peuple déplacé de force, absent, étranger chez lui et réfugié chez d’autres après que son nom a été effacé. ».
Pendant des décennies on a dit que le peuple palestinien n’existait pas, on les a appelés réfugiés, ou réfugiés des territoires (sans jamais dire qu’ils étaient occupés), ou Arabes des territoires, et pour ceux qui étaient restés en 1948 en Israël, c’était Arabes israéliens. Depuis 1967, les Palestiniens ont mené un combat pour ramener leur nom sur la scène. Aujourd’hui, ce combat a porté ses fruits ; redonnons la parole à Elias Sanbar : « Aujourd’hui, même nos pires ennemis, même les massacreurs n’osent plus dire que nous n’existons pas. Nous existons. Avec des variations sur le thème : ils sont impossibles, ils sont infréquentables, on ne peut pas leur faire confiance, mais ils existent. Nous sommes passés de l’invisibilité à la visibilité avec le retour de notre nom. Nous nous sommes battus pendant 50 ans pour dire, nous existons, nous avons un nom, car, quand vous n’avez pas de nom, vous n’existez pas. La reconquête du nom a été la grande guerre du peuple palestinien et elle est accomplie aujourd’hui. ».
Ce retour du nom, c’est, définitivement aux Palestiniens de Gaza et aux Résistants de toute la Palestine qu’on le doit. Les Sionistes ont dû changer leur fusil idéologique d’épaule, passer de l’invisibilisation à la déshumanisation, avec « Les animaux humains », par exemple, mais aujourd’hui plus personne ne se souvient que Bezalel Smotrich, l’un des ministres fascistes de Netanyahu, disait à qui voulait l’entendre que le peuple palestinien n’existait pas ? Qui se souvient que Geert Wilders, le nationaliste fascisant des Pays Bas disait que le pays des Palestiniens, c’était la Jordanie ? La Résistance acharnée des Palestiniens et le formidable élan de solidarité dans le monde, des travailleurs et des peuples ont permis cela. Les Palestiniens existent.
Ils étaient 1,4 millions en 1948, ils sont aujourd’hui 13 millions dont 60 % de réfugiés. Les successeurs de Ben Gourion, Netanyahu en tête, rêvent d’achever le travail, c’est-à-dire d’en finir avec ceux qui sont restés. C’est cela et cela seulement le but de cette guerre pour les sionistes.
Mais ce n’est pas si simple. Dans la Bande de Gaza, le but est double, chasser en en tuant le plus possible les civils et anéantir la Résistance armée. Or, plus l’armée d’occupation bombarde, plus elle fait savoir au monde que ses objectifs militaires ne sont pas atteints. Les combats continuent partout, y compris dans le Nord de la Bande que Netanyahu a annoncée neutralisée depuis près de six mois. Cette guerre, pour peu qu’on s’y intéresse sans les media officiels, nous dit combien l’armée d’occupation est défaite. Elias Sanbar nous le dit en ces termes : « Nous en sommes à la millième annonce que tout est terminé, et ça continue. Ça continue, parce que ça ne marche pas. […] Dans ce territoire de 60 km², nous avons constamment des preuves que cette armée n’atteint pas ses objectifs. Et plus ils échouent, plus ils se vengent sur les civils. ».
L’autre énorme difficulté que rencontrent les sionistes, c’est que les gens de Gaza ne partent pas. Dans chacune des paroles que nous entendons des Palestiniens de Gaza, revient une phrase forte et régulière : « Nous ne partirons pas. ». Il faut savoir que près de 80 % des habitants de la Bande de Gaza sont des descendants des réfugiés de 1948, qui sont nés et ont vécu dans les camps, comme celui de Khan Younès. La leçon de la Naqbah est simple, c’est : « Si vous partez, vous ne reviendrez plus. » ; les habitants de Gaza le savent, alors malgré tout ce qu’ils subissent, malgré les souffrances, ils ne partent pas.
La guerre est en train de prendre d’autres proportions, en Cisjordanie aussi, nous arrivons à une guerre d’annexion avec un double but : tuer ou faire partir. « Israël veut que Gaza devienne la Cisjordanie, une terre occupée et colonisée, et que la Cisjordanie devienne la Bande de Gaza, une terre détruite et rasée ; alors le travail sera terminé. », nous dit encore Elias Sanbar.
Sanbar nous explique que les Palestiniens ont tenu aussi grâce à leur culture, leur poésie, une pratique collective chez eux ; « Nous avons emporté cela avec nous quand on nous a chassés. », ajoute-t-il. Cet intellectuel est admiratif devant les prolétaires de Gaza qui restent malgré tout. Quand on voit les mépris de classe dont font preuve certains intellectuels de gauches en France vis-à-vis des ouvriers qui votent mal, on peut d’autant plus saluer cette admiration et ce grand intellectuel qu’est Elias Sanbar.
 
En Conclusion
Les Palestiniens, avec ou sans armes, résistent et l’armée d’occupation est en difficulté, l’État sioniste lui-même est au bord de la rupture. Voilà de quoi mettre du baume au cœur à celles ceux qui combattent à leur manière pour la libération de la Palestine.
Comme tous ces partisans de la libération de la Palestine dans le monde, nous continuons et nous continuerons, inlassablement, d’exiger un cessez-le-feu immédiat et permanent, de même que l’accès libre aux humanitaires dans toute la Bande de Gaza, et le retrait total des forces d’occupation de l’enclave. Mais, cela ne saurait suffire.
Une paix juste, c’est le démantèlement des colonies, le retour des réfugiés et un Etat palestinien indépendant. Ce qui empêche une telle paix c’est l’existence d’un Etat colonial. Les travailleurs d’Israël ne peuvent être libres s’ils ne rompent pas avec le sionisme, s’ils continuent de se trouver objectivement dans le camp des colonisateurs. La solidarité avec la Palestine ne peut se contenter de phrases générales sur la paix. Il faut un Etat où tous les habitants jouissent des mêmes droits et puissent vivre ensemble, quelles que soient leur origine, en l’occurrence, un État palestinien démocratique. De même, la lutte de libération nationale du peuple palestinien n’a pas besoin de compassion, mais d’un réel soutien politique et d’actions de solidarité internationaliste. Et pour la France, où les Révolutionnaires, comme ailleurs, doivent combattre d’abord leurs capitalistes, cela commence par la lutte politique contre le soutien de l’impérialisme français à l’État colonial sioniste.
C'est pourquoi, le Parti Révolutionnaire Communistes entend continuer de rassembler tous ceux qui veulent un cessez le feu immédiat pour que cesse le massacre des Palestiniens et se prononcent pour la paix. Pour nous, cela passe par le soutien aux revendications fondamentales du mouvement de libération nationale palestinien, surtout après l’assassinat d’un de ses dirigeants : fin immédiate de l'agression militaire sioniste, droit au retour des réfugiés et formation d'un État palestinien sur le territoire de la Palestine mandataire.
[1] Ibrahim Souss, né en 1945, est un écrivain et musicien palestinien, qui fut, de 1978 à 1992, représentant de l’OLP en France.