N° 867 03/04/2024 L’impérialisme US : faux et usage de faux
Après le vote de la résolution exigeant un cessez-le-feu à Gaza, des responsables du gouvernement des USA se sont empressés de rassurer les dirigeants israéliens, quelque peu énervés. Des porte-parole ont précisé à la fois que la résolution n’était pas contraignante, ce qui est faux, toutes les résolutions du Conseil de Sécurité le sont, et que cela ne valait que pour le mois du ramadan, ce qui est vrai et constitue une limite insupportable de la résolution.
Et pour bien faire comprendre qu’ils n’ont pas changé de ligne, les dirigeants US ont répondu favorablement à une demande du ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant. Le vendredi 29 mars, le Washington Post, en général bien informé pour ce qui est de la Maison Blanche a rapporté que le gouvernement des États-Unis a donné son feu vert au transfert de bombes et d’avions de combat d’une valeur de plusieurs milliards de dollars vers Israël. Le journal, en bon soldat de l’idéologie dominante, a tenu à ajouter « même s’ils expriment publiquement leurs inquiétudes concernant la menace israélienne de longue date d’invasion de Rafah à Gaza et l’augmentation des pertes civiles dans l’enclave ». Le valet hypocrite a tenté de défendre le maître hypocrite et menteur. Le nouveau paquet d'armes comprend plus de 1.800 bombes MK84 de 2.000 livres et 500 bombes MK82 de 500 livres, selon des responsables du Pentagone et du Département d'État.
Cela va-t-il gêner nos media qui, en France, nous abreuvent depuis quelques semaines, sur le changement d’attitude des USA vis-à-vis de l’État sioniste ? Rien n’est moins sûr ! L’État colonial est toujours le « prolongement organique de l’impérialisme occidental », et pour des raisons qui échappent aux journalistes et politiciens qui ne raisonnent pas en termes de classes, les multinationales US ne peuvent pas lâcher Israël, leur excroissance au Proche Orient. Tout changement en parole, chez les dirigeants de l’impérialisme dominant et de ses vassaux, ne peut être que du vent et du mensonge !
En Israël, l’idéologie colonialiste perdure
Des manifestations contre Netanyahu, mais pas contre la guerre
Les rues de Jérusalem ont retrouvé une animation oubliée depuis six mois, dimanche 31 mars. A l’appel d’opposants au gouvernement de Netanyahu, des dizaines de milliers de manifestants se sont réunis autour de la Knesset, pour appeler à des élections et, pour certains, à un accord avec le Hamas, qui permettrait la libération des otages à Gaza.
L’ampleur de ce rassemblement ne peut se comparer à celle des défilés historiques, qui avaient encombré chaque semaine les rues du pays l’an dernier, jusqu’à la veille de la guerre. Une majorité d’Israéliens s’opposait alors à un bouleversement de l’équilibre institutionnel du pays voulu par Netanyahu et ses alliés fascistes religieux, qualifié par ses opposants de « coup d’État ».
Il y a vraiment à boire et à manger dans ces défilés. Les « Frères d’armes », un groupe sioniste, se sont fait remarquer en se rendant dans les quartiers ultraorthodoxes de Jérusalem, pour y défier les haredim (les « craignant Dieu »), qui exigent du premier ministre une loi perpétuant leur exemption de service militaire. Cette prise à partie trouve un écho certain dans la société israélienne, qui tolère de moins en moins la dispense de service des haredim (18 % des jeunes en âge de servir), à l’heure où l’armée manque de bras, et où des réservistes commencent à recevoir leurs ordres de rappel pour le printemps.
A contrario, seul un carré de militants anti-occupation étaient présents parmi les manifestants et évoquaient le sort des Palestiniens de Gaza. Le Monde, qui renseigne l’événement, nous dit que : « la société israélienne demeure dans son écrasante majorité peu informée et peu concernée par la pénurie de nourriture que l’armée orchestre dans l’enclave. ».
Parmi les autres manifestants, les familles des captifs qu’il est convenu d’appeler « otages » et leurs soutiens sont les seuls à remettre en cause la politique de Netanyahu. Ils accusent le premier ministre de faire durer la guerre, et la captivité des leurs, afin de prolonger son règne. « Vous êtes le principal obstacle à un accord [négocié avec le Hamas], affirmaient-ils dans un communiqué. Nous agirons avec force pour votre départ immédiat et votre replacement parce que c’est le seul moyen de ramener [les otages] à la maison. Nous vous poursuivrons et nous ne cesserons pas. ».
Pour tous les autres, la question est simplement de savoir si Netanyahu est le mieux placé pour « finir le travail ». Là encore, ce que dit Le Monde est assez clair : « une partie d’entre eux [les manifestants] est sensible aux appels de M. Netanyahu, qui depuis décembre 2023 affirme être le seul à pouvoir empêcher le grand allié américain d’imposer après la guerre des négociations visant à faire naître un État palestinien. ».
Pas plus que l’écrasante majorité des manifestants d’il y a plus de six mois ne s’intéressaient à la question palestinienne, l’énorme majorité de ceux du 30 mars ne remet en cause la guerre génocidaire à Gaza. Elle cherche seulement à savoir qui la mènera le mieux, en ramenant les captifs à la maison.
L'accord largement majoritaire de la population israélienne juive avec le génocide en cours ne fait pas de doute, raison de plus, pour ne pas mettre sur le même plan les colonialistes et les colonisés.
Les négociations pour une trêve
Sous l’égide du Qatar et de l’Égypte, elles sont en cours depuis près de deux mois, mais achoppent régulièrement. Au grand dam des USA, la résolution adoptée récemment par le Conseil de sécurité de l’ONU ne mentionne pas ces tractations en coulisse. Mais les raisons des échecs successifs commencent à être connues.
Selon Le Monde, « Depuis plusieurs jours, des fuites révèlent l’agacement croissant d’une part des négociateurs israéliens, responsables du renseignement et militaires, et des membres du cabinet de guerre vis-à-vis de M. Netanyahu. Le premier ministre est blâmé pour une méthode de négociation qui a fait multiplier à ces officiels les voyages au Caire et à Doha, puis les retours à Tel-Aviv pour consultations, et allongé les délais entre chaque voyage pour redéfinir leurs ordres de mission. Une réunion houleuse du cabinet de sécurité, jeudi 28 mars, a suscité des critiques de ministres du Likoud, qui demandent plus de compromis. ».
Cela confirme que les dirigeants de l’État sioniste ne sont pas d’accord entre eux sur le degré de concessions à faire aux combattants palestiniens. Certains sont probablement plus conscients que d’autre que la guerre, avec son cortège de famine et de destruction des hôpitaux, avec le blocage des camions de ravitaillement, permet certes d’éliminer nombre de civils palestiniens, mais que la résistance armée n’est toujours pas vaincue. Ou bien, ils s’inquiètent du discrédit grandissant de l’État colonial dans le monde.
Toujours est-il que les combattants palestiniens, par la voix des dirigeants gazaouis du Hamas, demandent un retrait des forces israéliennes hors de Gaza, le retour des déplacés dans le Nord de l’enclave, le début de la reconstruction et la libération de détenus des prisons israéliennes. Le gouvernement israélien, pour sa part, prétend négocier dans un premier temps la libération d’une partie des otages, les civils et les femmes militaires, et, comme dit encore Le Monde, « se garde d’évoquer précisément le sort des hommes capturés en uniforme le 7 octobre, au désespoir de leurs familles. ».
D’un côté, les combattants palestiniens de Gaza demandent un vrai cessez-le-feu permanent et un retour à la normale, de l’autre Netanyahu et la majorité de son gouvernement n’envisagent qu’une pause de plusieurs semaines dans les combats, et souhaitent reprendre la guerre, notamment à Rafah, durant des mois, voire des années.
Ce n’est donc pas ainsi qu’une solution durable sera trouvée. Mais il est certain que si l’État sioniste était privé d’armes et de munitions, si le pays était l’objet de sanctions diplomatiques et économiques, cela changerait probablement la donne, et une vraie négociation serait possible. C’est pourquoi la poursuite des luttes de solidarité internationale des travailleurs, des peuples avec les Palestiniens est essentielle.
Le sort des Palestiniens travaillant en Israël, le rôle de la Histadrout
Des milliers de travailleurs de Cisjordanie et de Gaza sont toujours emprisonnés dans les geôles israéliennes. Certains sont parqués dans des cages métalliques dans la cour des prisons faute de place dans les cellules surpeuplées. Ces travailleurs sont officiellement détenus parce qu’ils n’ont pas de permis de travail. Pourtant ils avaient tous un permis jusqu’au 7 octobre, permis annulé pour l’ensemble des 180.000 travailleurs palestiniens de la bande de Gaza et de la Cisjordanie dès le 8 octobre.
Dès le 23 octobre, l’organisation israélienne Histadrout, « syndicat », sioniste, ultra majoritaire dans l’État colonial, qui soutient les mesures d’apartheid à l’encontre des travailleurs palestiniens, appelait les patrons israéliens à licencier tout travailleur qui « se solidarise, soutient ou déclare qu’il est solidaire du terrorisme dans les conditions de guerre ». Dans l’État d’Israël depuis octobre, la moindre expression d’empathie des Palestiniens de l’intérieur, « citoyens arabes israéliens », vis-à-vis du sort des habitants de la bande de Gaza est considérée comme solidaire du terrorisme !
La répression concerne toutes les catégories de salariés, y compris dans les hôpitaux israéliens. Le rapport de la Histadrout indique qu’une infirmière d’un hôpital de Tel-Aviv, qui a exprimé sa colère sur sa page Facebook après le massacre commis par l’armée israélienne dans le camp de réfugiés de Jabalia, en janvier, a été licenciée sur le champ avec ce commentaire du directeur de l’hôpital : « Virez cette ordure humaine qui soutient le Hamas et le terrorisme, elle n’a pas sa place parmi nous ». Les avocats palestiniens ont été informés en octobre par le « Comité disciplinaire du barreau », qu’il y aurait une tolérance zéro et des poursuites judiciaires contre tout avocat qui publierait sur les réseaux sociaux un contenu pouvant être considéré comme une « incitation à la violence ».
Malgré cette répression d’État, devenue institutionnelle, les actions de solidarité des Palestiniens de l’intérieur avec la population de la bande de Gaza, menées parfois conjointement avec des associations démocratiques juives, notamment dans le Nord-Ouest d’Israël, s’organisent, en particulier dans la collecte de matériel médical et de médicaments. Mais il est de plus en plus difficile de faire parvenir cette aide à Gaza.
Comprendre l’enjeu de la lutte pour la Palestine libre
Depuis que le génocide a commencé dans la Bande de Gaza, les colonialistes et leur armée utilisent tous les moyens, la famine, et la privation de soins, les massacres ciblés ou pas, pour détruire l’enclave de Gaza et ses habitants, pour effacer de la mémoire des hommes une civilisation vielle de plusieurs milliers d’année. Ils font cela impunément, mais aux yeux du monde. Et pour que ces yeux ne puissent plus voir, ils tuent les journalistes, les soignants, les personnels de l’ONU, tous les témoins gênants. Et pourtant, malgré tout, nous savons.
Alors, il est temps de se poser une question fondamentale. Comment des gens qui se disent les héritiers des victimes de l’extermination des juifs puissent organiser ou valider un effort d’extermination sur une autre population ? Il faut bien comprendre que cette façon de raconter l’histoire est entièrement fausse. Nous l’avons plusieurs fois expliqué, le projet sioniste est bien antérieur à la Seconde Guerre Mondiale. Il a rejoint celui des impérialistes britanniques qui souhaitaient un pied à terre au Proche-Orient.
Sarah Katz, une des porte-parole de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP) dit dans une vidéo : « Ce ne sont pas les descendants de la Shoah qui ont créé Israël, pas du tout. Ce sont des gens dont l’idéologie est suprémaciste. Je le dis clairement, l’idéologie sioniste est plus proche de ceux qui ont fait le massacre des juifs d’Europe que de ceux qui l’ont subie. C’est l’idée qu’il y a des populations qui ont plus de droits que d’autres. […] Ils sont du côté de l’impérialisme, ils sont une des mains de l’impérialisme au Proche-Orient ».
La Palestine, cela concerne tout le monde. Comme le dit Sarah, ce n’est pas une « fixette militante ». A celles et ceux qui veulent relativiser, qui disent qu’il y a d’autres guerres, qui parlent de paix en général, sans distinguer une guerre de libération nationale des guerres impérialistes, qui râlent parce qu’on leur parle encore de la Palestine, le Parti Révolutionnaire Communistes répond : « Pourquoi est-ce si important la Palestine ? Parce que c’est la dernière aventure coloniale, le dernier conflit colonial du XXème siècle. Parce que la décolonisation, entreprise dès la fin des années quarante, ne sera terminée que lorsque la Palestine sera libre. ». C’est un enjeu qui concerne l’ensemble des travailleurs du monde.
Et Sarah de continuer : « Je crois qu’on est vraiment à l’os, qu’on est vraiment front contre front, il faut que l’humanité dise qu’elle ne veut plus de ces idéologies-là ; parce que, si on perd en Palestine, ça veut dire qu’on perdra dans d’autres endroits aussi, ça veut dire que ces idéologies criminelles vont continuer à grandir. Donc, il faut absolument arriver à briser l’attaque contre le peuple palestinien et à le rétablir dans ses droits. Ça nous concerne chacun, personnellement. ».
Oui, le combat pour la libération de la Palestine est un combat essentiel, en particulier pour les Communistes, dont l’anticolonialisme est comme une empreinte génétique. Ce n’est pas un vague combat pacifiste sans saveur, une sorte de manifeste disant : « La guerre, ce n’est pas beau ! ». La guerre en cours à Gaza n’est absolument pas de même nature que les guerres impérialistes, directes comme en Ukraine, indirectes comme en RPD du Congo, au Soudan ou comme celles que les bandes maffieuses fascistes islamistes mènent en Afrique, comme larbins des puissances impérialistes occidentales, en particulier les USA.
Si la nature de la guerre n’est pas la même, forcément, la réponse non plus ne peut être la même. On ne peut se contenter de demander la paix entre un État colonial et un peuple colonisé ; ce qui est juste, c’est de réclamer la fin de l’État colonial, c’est le préalable à toute paix, à toute possibilité pour les deux peuples de vivre ensemble.
C’est ce que le Parti Révolutionnaire Communistes dit inlassablement et qu’il continuera de dire, contrairement aux pseudos défenseurs de la paix dans les salons. Ce qui est difficile pour les tenants des torts partagés, les idiots utiles de la pseudo solution à deux États, celles et ceux qui choisissent de ne pas voir l’occupation, encore moins l’État colonial, celles et ceux qui parlent de paix sans distinguer un peuple colonisé et un État colonisateur, c’est que, pour comprendre au sens propre du terme, ce qui se passe depuis 75, voire 100 ans en Palestine, et encore plus ce qui se passe aujourd’hui, il faut avoir cette boussole de l’anticolonialisme, de la guerre de libération nationale, il faut raisonner en termes marxistes.
L’idéologie sioniste est, par nature, une idéologie coloniale, elle doit être vaincue. Le combat des résistants palestiniens est juste, la solidarité active dans le monde avec la Palestine aussi.
C'est pourquoi, le Parti Révolutionnaire Communistes soutient les revendications fondamentales du mouvement de libération nationale palestinien : fin immédiate de l'agression militaire sioniste, droit au retour des réfugiés, formation d'un État palestinien sur le territoire de la Palestine mandataire. Dans ce mois pour la libération de G. Abdallah, nous nous associons fermement à sa demande de libération, qui sera portée par la manifestation à Lannemezan, samedi 6 avril, et à son soutien à la lutte du peuple palestinien.