N° 864 14/03/2024 La situation en Palestine
Le cynisme des États impérialistes occidentaux et de leurs valets
La dénonciation grandissante dans le monde de l’état de dénutrition et de santé des habitants de Gaza, qui a déjà été responsable de la mort de 17 enfants en mars, force les dirigeants occidentaux à faire semblant de faire quelque chose pour ne pas laisser les Palestiniens mourir de faim, de froid, ou de maladie. C’est ainsi que Biden a annoncé la construction d’un port, en fait une jetée temporaire à 500 m de la côte de la Bande de Gaza. Mais, le vaisseau transportant les éléments de ce meccano vient à peine de quitter la Virginie, et la construction pourrait durer deux mois. Le temps de laisser mourir pas mal de gens ! D’autant plus que, comme l’indique le quotidien israélien Haaretz : « Mais l’afflux de grandes quantités de marchandises nécessitera des préparatifs particuliers – entrepôts, transport, sécurité et supervision de la distribution, lesquels n’ont pu encore être organisés. ». Les USA se sont assuré la collaboration des Émirats Arabes Unis pour financer cette entreprise.
Le navire Open Arms de l’ONG américaine « World Central Kitchen », affrété, dans une opération conjointe, par l’ONG espagnole « Open Arms », mouille depuis trois semaines dans les eaux du port chypriote de Larnaca. Ce navire a quitté Larnaca le 12 mars et se diriger vers la bande de Gaza, inaugurant ainsi un corridor humanitaire maritime « susceptible de changer radicalement la façon dont l’aide est acheminée vers le territoire palestinien », comme le dit Haaretz. Ce navire, chargé de plus de 200 tonnes de farine, de riz, de boîtes de thon et d’autres produits de base, a déjà été inspecté par des militaires israéliens.
On ne sait toujours pas comment sa cargaison sera déchargée et distribuée, vu que la construction de la jetée américaine temporaire pourrait prendre encore deux mois. Toujours est-il que Washington a annoncé que la cargaison du navire serait déchargée sur des barges et de petits bateaux capables de s’amarrer à la côte gazaouie. Bref, une incertitude totale.
Outre le fait d’amuser la galerie, comme le largage par avion de nourriture et de médicaments par la France te la Jordanie, le but réel des États-Unis est d’aider leur vassal sioniste à se débarrasser de la trop gênante UNRWA, sans le témoignage de laquelle, par exemple, la Cour Internationale de Justice n’aurait pas exigé des mesures de la part d’Israël. Et peut-être même d’installer l’armée israélienne comme garante du maintien de l’ordre, bref, aider encore plus l’occupation, qui peine à obtenir d’autres résultats que le génocide, c’est le moins que l’on puisse dire. Depuis les près de 200 morts palestiniens qui voulaient manger, il est certain que le contrôle du ravitaillement par les sionistes augmenterait le massacre.
En premier lieu, on peut remarquer l’hypocrisie qui consiste à faire croire qu’on veut aider les Palestiniens et à continuer d’armer l’armée coloniale, comme le font la France et les USA, à refuser de sanctionner, d’une manière ou d’une autre, Israël ou de dénoncer l’accord de normalisation qui les lient à l’État colonial, comme les Émirats et la Jordanie.
En second lieu, s’il s’agissait vraiment de venir en aide aux Palestiniens, il y aurait bien une vraie solution : exiger un cessez-le-feu, ne serait-ce qu’en arrêtant de fournir des munitions, ainsi que le retrait de l’armée d’occupation de la Bande de Gaza et ouvrir en grand les portes de Rafah sur l’Égypte, pour laisser passer les camions de ravitaillement. Mais, comme nous l’avons dit, le but des dirigeants US est tout autre.
Les violences subies par les femmes palestiniennes
Dans un article publié le 9 mars dernier¹, la journaliste Meriem Laribi alerte sur les violences subies par les femmes palestiniennes du fait de l’armée d’occupation et de l’État colonial.
Huit expertes de l’ONU ont sonné l’alarme le 19 février. Dans un communiqué, elles expriment leurs « plus vives inquiétudes » à propos des informations obtenues de « différentes sources ». Elles dénoncent des exécutions sommaires, des viols, des agressions sexuelles, des passages à tabac et des humiliations sur les femmes et les jeunes filles palestiniennes de Gaza, comme de Cisjordanie. Elles évoquent « des allégations crédibles de violations flagrantes des droits humains », dont les femmes et les filles palestiniennes « sont et continuent d’être victimes ».
Selon les témoignages, les informations et les images qu’elles ont pu recouper, des femmes et des jeunes « auraient été exécutées arbitrairement à Gaza, souvent avec des membres de leur famille, y compris leurs enfants ». « Nous sommes choquées par les informations faisant état du ciblage délibéré et de l’exécution extrajudiciaire de femmes et d’enfants palestiniens dans des lieux où ils ont cherché refuge ou alors qu’ils fuyaient », parfois en tenant, bien en évidence, des tissus blancs, en signe de paix. Meriem Laribi nous révèle que : « Une vidéo diffusée par Middle East Eye et ayant beaucoup circulé montre notamment une grand-mère palestinienne abattue par les forces israéliennes dans les rues du centre de la ville de Gaza, le 12 novembre, alors qu’elle et d’autres personnes tentaient d’évacuer la zone. Au moment de son exécution, cette femme, nommée Hala Khreis, tenait par la main son petit-fils qui brandissait un drapeau blanc. »
Reem Alsalem, rapporteuse spéciale sur les violences faites aux femmes auprès de l’ONU, dénonce pêle-mêle
- les détentions arbitraires : « 200 femmes et jeunes filles de Gaza, 147 femmes et 245 enfants de Cisjordanie sont actuellement détenus par Israël » ;
- les conditions de détention « elles sont soumises à des traitements inhumains et dégradants, privées de serviettes hygiéniques, de nourriture et de médicaments » ;
- les violences sexuelles « les femmes et les filles palestiniennes détenues ont également été soumises à de multiples formes d’agression sexuelle, comme le fait d’être déshabillées et fouillées par des officiers masculins de l’armée israélienne. Au moins deux détenues palestiniennes auraient été violées et d’autres auraient été menacées de viol et de violence sexuelle » ;
- le mépris des autorités israéliennes face aux alertes : « Nous n’avons reçu aucune réponse, ce qui est malheureusement la norme de la part du gouvernement israélien qui ne s’engage pas de manière constructive avec les procédures spéciales ou les experts indépendants. ».
Enfin, laissons la conclusion de ce chapitre à Meriem Laribi : « Les Palestiniennes payent un très lourd tribut au génocide en cours à Gaza. L’ONU évalue à 9 000 le nombre de femmes tuées depuis le 7 octobre 2023. Celles qui survivent ont souvent perdu leurs enfants, leur mari et des dizaines de membres de leur famille. Il faut évoquer la condition des femmes enceintes qui étaient plus de 50.000 au moment du déclenchement des hostilités et qui accouchent, depuis, sans anesthésie et, le plus souvent, sans assistance médicale. De nombreux nouveau-nés sont morts d’hypothermie au bout de quelques jours. Les femmes dénutries ont du mal à allaiter et le lait infantile est une denrée rare. Les chiffres évoluent chaque jour cependant au 5 mars, au moins 16 enfants et bébés sont morts de malnutrition et déshydratation8 à Gaza en raison du siège total et du blocage de l’aide humanitaire par Israël. »
La riposte se poursuit dans le monde, malgré les menaces, les pressions, et la répression.
Aux États-Unis
Le 8 mars, avant le discours sur l’état de l’Union de Joe Biden, des manifestants soutenant la cause palestinienne ont bloqué les routes menant au Congrès américain, exigeant un cessez-le-feu permanent dans la bande de Gaza. Le cortège présidentiel a dû emprunter un itinéraire plus long que d’habitude pour éviter les manifestations.
Des milliers de personnes se sont rassemblées près de la Maison-Blanche à Washington, provoquant la fermeture de certaines routes par la police, tandis que des actions similaires ont eu lieu à Boston et Los Angeles (avec l’arrestation de plus de 50 personnes dans cette dernière ville).
Samedi 9 mars, La police de New York a procédé à l’arrestation d’environ 20 manifestants lors d’une marche pacifique à travers les rues de la ville, appelant à la cessation de l’agression israélienne sur la bande de Gaza. Des vidéos et des photos diffusées ont montré une forte présence policière le long des principaux axes empruntés par la marche. Munis de drapeaux palestiniens, les participants ont scandé des slogans demandant l’arrêt des hostilités envers Gaza et la prévention d’une invasion de la ville de Rafah, tout en appelant à la fin du soutien américain à l’occupation israélienne.
Au Royaume Uni
Encore une fois, plus de cent mille personnes ont manifesté à Londres et deux fois plus dans le reste du Royaume Uni ce samedi 9 mars. Partis de Hyde Park Corner, dans le centre de la capitale, les manifestants ayant répondu à l'appel du groupe « Palestine Solidarity Campaign », se sont rendus, sous très haute présence policière, devant l'ambassade états-unienne.
Aux Pays-Bas
« Plus jamais ça, c'est maintenant ! ». Plusieurs centaines de personnes, arborant des drapeaux palestiniens et dénonçant le génocide perpétré par Israël dans la bande de Gaza, se sont rassemblées devant le musée de l'Holocauste à Amsterdam, inauguré ce dimanche 10 mars par le roi en présence du président israélien, Isaac Herzog. Les manifestants ont déclaré que Herzog n’avait pas sa place aux Pays Bas sauf pour comparaître devant la Cour pénale internationale. Le sentiment de beaucoup de juifs présents était que la présence du président salissait la souffrance de leurs ancêtres.
Au Maroc
Ce dimanche 10 mars, des manifestations massives ont une fois de plus été organisées aux quatre coins du Maroc, cette fois par des Marocaines en solidarité avec les Palestiniennes de la bande de Gaza. Dans un élan de solidarité avec les Palestiniennes, les Marocaines se sont rassemblées dans plusieurs villes du pays, à savoir Casablanca à l’ouest, Agadir au centre et Tanger au nord.
Ces manifestations font suite à un appel du « Front marocain de soutien à la Palestine et contre la normalisation » pour souligner le soutien des Marocaines aux Palestiniennes confrontées à des conditions de vie de plus en plus difficiles et à une catastrophe humanitaire de plus en plus grave. Elles portent aussi une demande d’abrogation de l’accord de normalisation entre le royaume et l’État sioniste, signé le 22 décembre 2020 par le premier ministre du Parti de la Justice et du Développement (PJD), la branche locale des Frères Musulmans.
Les oscars et les pressions multiples
Le réalisateur Jonathan Glazer a longuement été applaudi lors de la 96e cérémonie des Oscars à Los Angeles ce dimanche 10 mars. Le britannique de 58 ans a reçu le prix du meilleur film étranger pour » La Zone d'Intérêt », qui raconte la vie insouciante d'une famille de nazis juste à côté d'Auschwitz.
Sur la scène du Dolby Theater, aux côtés du producteur James Wilson, Jonathan Glazer en a profité pour lancer un message de paix au Proche-Orient et dénoncer le massacre et la déshumanisation des Palestiniens. « Notre film montre comment la déshumanisation mène au pire », a lancé Jonathan Glazer. Parlant au nom du producteur et de lui-même, il a ajouté : « Aujourd’hui, nous nous tenons devant vous comme des hommes qui refusons que notre judéité et l’Holocauste soient détournés pour une occupation qui a causé tant de souffrances pour tant d’innocents. Qu’il s’agisse des victimes du 7 octobre en Israël ou de celles des attaques incessantes qui se déroulent à Gaza, elles sont toutes des victimes de cette déshumanisation ».
Pourtant, même s’il a repris la philosophie des torts partagés en parlant aussi de l’attaque palestinienne, il a subi une volée de bois vert. En particulier il a dû essuyer les critiques d’un responsable de la « Fondation des Survivants de l’Holocauste aux USA », qui, outre l’habituelle répartie sur la barbarie du Hamas lui a rétorqué « si la création, l’existence et la survie de l’État d’Israël en tant qu’État juif équivaut dans votre esprit à une occupation, que vous n’avez rien compris à votre film ». Ce qui prouve, s’il en était besoin, la difficulté de discuter avec des sionistes. Et, aux USA, des cinémas ont annoncé qu’ils déprogrammaient son film !!!
On ne peut terminer ce chapitre sans évoquer BFM TV, les champions olympiques de la désinformation. Retranscrivant le discours de Glazer, la chaîne du milliardaire sioniste Drahi a commis une « erreur » au lieu d’écrire : « des hommes qui refusons que notre judéité et l’Holocauste… », ils ont retranscrit : « des hommes qui réfutent leur judéité et le fait que l’holocauste… ». Et BFM n’est pas le seul media à avoir déformé. La déformation s’est répandue à tel point qu’une chroniqueuse du Jérusalem Post a cru bon de s’adresser au réalisateur en ces termes : « Israël se moque que vous “réfutiez votre judéité”, ce qui ne nous empêchera pas de mettre fin au Hamas et d’empêcher un autre 7 octobre. Les terroristes se moquent de savoir si vous vous sentez juif, vous auriez été leur cible de toute façon. ». La propagande colonialiste est décidément très efficace parmi le peuple colonisateur et ses soutiens.
En France, la solidarité s’organise
En France, nous le savons, la mobilisation n’est pas partout à la hauteur, tellement les « partageurs de torts » brouillent le message en refusant de caractériser cette guerre pour ce qu’elle est : un conflit colonial qui dure depuis 75 ans.
Pourtant, dans les milieux militants, chez les travailleurs, la conscience grandit qu’il ne suffit pas de prôner la paix, que cette guerre oppose un État colonisateur à un peuple colonisé, que nous sommes face à un génocide, qu’il faut défendre les Palestiniens, leurs droits et leur État.
Assemblée débat organisée le 5 mars par la CGT à Sorbonne Université
Un amphi plein, une participation jeune venue à la fois s'informer sur la situation en Palestine et surtout marquer sa solidarité avec le peuple palestinien. Le débat a été ouvert par une intervention du chercheur Ziad Majed qui a montré la continuité de la politique de colonisation israélienne et d'expulsion des Palestiniens de leur territoire, la violence de la répression coloniale qui a fait plus de 30.000 morts et 70.000 blessés et qui réduit à la famine la population de Gaza. Selon ce chercheur, tout est fait pour rendre impossible la construction d'un État palestinien. En conclusion, il a appelé à un cessez le feu immédiat et à une solidarité concrète par des projets solidaires avec la Palestine et tout particulièrement dans le domaine de l'enseignement supérieur.
Plusieurs interventions d'associations : Stop Arming Israël, le Collectif Éducation pour Gaza et l'association Boycott Désinvestissement Sanctions, ont mis en lumière les actions possibles pour soutenir le peuple palestinien et ont montré que dans l'enseignement supérieur et la recherche, il est possible de construire des actions concrètes de solidarité. Le Doyen de la Faculté de pharmacie de Gaza est intervenu par visio-conférence en montrant l'acharnement de la puissance colonisatrice occupante à réduire à néant les efforts du peuple palestinien à former des cadres dans les secteurs médicaux, mais aussi l'énergie des Palestiniens à ne pas céder et à reconstruire. Dans ce sens, l'idée de participer à l'accueil d'étudiants palestiniens et à mettre en œuvre des formations à distance a été retenus comme un objectif de lutte.
La journée des universités le 12 mars
Mardi 12 mars s’est tenue une journée d’action dans plusieurs pays d’Europe et, en France, à l’appel de la « Coordination universitaire contre la colonisation en Palestine ». Il s’agissait d’une journée de solidarité universitaire avec le peuple palestinien, face à la complicité active du gouvernement français dans cette guerre génocidaire menée par Israël contre le peuple palestinien et la répression de la liberté d’expression autour de la Palestine.
La CUCCP, dans son appel, a rappelé que l’armée israélienne a tué 94 professeurs d'université, 231 enseignants et plus de 4300 étudiants et étudiantes, en plus de détruire l’ensemble des universités gazaouies et 346 écoles. Elle a invité le monde académique français à rejoindre l’appel européen et exiger : un cessez-le feu immédiat, inconditionnel et permanent ; la levée permanente du blocus de Gaza ; et la défense du droit palestinien à l’éducation.
Durant la journée, les participants ont tenté de pousser leurs universités à agir activement contre le régime d’apartheid israélien, ont essayé d’établir des liens académiques avec des universités et des universitaires palestiniens. Ils ont soutenu et invité leurs collègues à participer au Boycott universitaire visant les institutions académiques israéliennes complices de la violation des droits des Palestiniens et promu la défense de la liberté d’expression et la liberté académique autour de la Palestine, ici et hors de France.
En conclusion
Même s’il continue de commettre des crimes horribles, notamment envers les femmes de Palestine, l’État d’Israël n’est pas en position de force, en témoignent à la fois les manœuvres US pour exclure l’UNRWA, les pressions et répressions diverses, la difficulté à obtenir une trêve sans cessez-le-feu permanent, et les luttes partout dans le monde, la prise de conscience de certains militants en France. De plus en plus de travailleurs comprennent que la source du problème, c’est l’existence même de l’État autoproclamé d’Israël, sa nature coloniale et de plus en plus théocratique.
A partir de ce constat, la position du Parti Révolutionnaire Communistes est claire. Il ne s’agit pas de « jeter les Juifs à la mer », mais d’en finir avec un État d’apartheid, théocratique, lui-même intitulé « État-Nation du peuple juif ».
C'est pourquoi, nous soutenons les revendications fondamentales du mouvement de libération nationale palestinien : fin de l'agression militaire sioniste, droit au retour des réfugiés, formation d'un État palestinien sur le territoire de la Palestine mandataire. Dans ce mois pour la libération de G. Abdallah, nous nous associons fermement à sa demande de libération et à son soutien à la lutte du peuple palestinien.