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N° 851 13/12/2023  Le veto des USA : comment défendre l’indéfendable.
Les États-Unis ont opposé leur veto vendredi 8 décembre à une résolution spéciale du Conseil de sécurité de l’ONU, créée en réponse à l’invocation de l’Article 99 de la Charte des Nations unies par le secrétaire général Antonio Guterres.
La résolution, présentée par les Emirats Arabes Unis a recueilli 13 voix pour (dont la France), 1 abstention (le Royaume Uni) et 1 seule voix contre, mais prépondérante à cause du droit de veto, celle des USA. Les arguments du représentant des États-Unis sont toujours aussi minables : pas de dénonciation des soi-disant « crimes du Hamas » dans la résolution.
La réalité c’est que Israël ne tient que grâce au soutien financier et notamment en armes et munitions de l’impérialisme dominant. La réalité, c’est que ce veto anéantit tout espoir d’un cessez-le-feu mandaté internationalement et d’une aide immédiate aux victimes palestiniennes du génocide perpétré par l’État et l’armée d’Israël. La réalité, c’est que, même lâché par tout le monde, l’ONU, qui est son instrument depuis 1945, la Grande-Bretagne, qui est son allié le plus fidèle, la France, l’impérialisme états-unien ne change pas d’un iota son attitude. Biden a beau disserter sur la soi-disant « solution à deux États », il se fout comme de sa première chemise du sort des Palestiniens massacré. Il (ou son entourage) est même prêt à perdre les élections si Israël peut continuer ses exactions et réaliser enfin l’annexion totale de la Palestine.
Cela veut dire qu’au-delà des querelles partisanes (les partis démocrates et républicain aux USA ne sont guère différents), permettre à Netanyahu d’aller jusqu’au bout est une priorité essentielle pour la puissance impérialiste dominante.
Pourquoi un tel soutien ? Pour répondre à cette question, il faut se pencher sur l’histoire de la Palestine, notamment au XXème siècle.
 
A l’origine de tout : le projet britannique du XIXème et du début du XXème siècle
Depuis la deuxième moitié du XIXème siècle, le Royaume Uni et la France, sont, avec la future Allemagne (qui ne naît qu’en 1871), les puissances capitalistes dominantes. Elles se lanceront ensuite dans la colonisation de l’Afrique et de l’Asie, parfois de manière conflictuelle, finalement, avec l’Entente cordiale, de manière négociée. L’un de leurs buts communs est le démantèlement de l’Empire Ottoman. La France s’empare de l’Algérie (de 1830 à 1857) et établit un protectorat sur la Tunisie (1881), le Royaume Uni occupe militairement l’Egypte déjà indépendante des Ottomans depuis 1848 (1882) puis établit un protectorat (1914). Seules provinces restées fidèles à l’Empire Ottoman, la Tripolitaine et la Cyrénaïque (qui constitueront la Libye), sont conquises par l’Italie en 1911. L’Empire Ottoman ne domine alors plus que la partie asiatique du monde arabo-berbère, qu’il perdra à la suite de la Première Guerre Mondiale.
Dès les années 1860, Lord Palmerston, premier ministre conservateur pour la seconde fois de Victoria (1859 – 1865) avait envisagé la création d’une colonie au Proche Orient, sur le territoire alors dominé par les Ottomans, d’un État tampon, une sorte de colonie peuplée d’Européens afin de couper en deux le monde arabo-berbère.
En 1907, le premier-ministre est alors le Libéral Henry Campbell-Bannerman. Libéraux et Conservateurs se sont beaucoup opposés sous Victoria, les Libéraux portant des réformes sociales et l’autonomie de l’Irlande, leur dirigeant historique, Gladstone a même refusé de manière hautaine la demande de l’ambassadeur de France en 1871 d’extradition des Communards réfugiés dans son pays. Mais, au début des années 1900, il apparaît un point commun entre Conservateurs et Libéraux : la défense et l’extension de l’Empire colonial. Campbell-Bannerman possède une majorité absolue à la Chambre des Communes et a en plus un accord avec le parti Travailliste récemment créé. Il préside alors une Conférence impériale, durant laquelle le statut de dominion fut entériné. Cette commission est constituée d'universitaires internationaux et doit réfléchir à l'avenir de l'Empire. Seuls des extraits du rapport furent publiés. Celui-ci suggérait, entre autres, de diviser le monde arabe en de nombreux États et d'installer en leur sein, en Palestine, une colonie qui soit hostile aux intérêts arabes et participe de leur division permanente. Le texte du rapport de la Commission indique : « Le danger réside dans le bassin méditerranéen, charnière entre l'Occident et l'Orient, et route de la Grande-Bretagne vers ses colonies d'Extrême-Orient, route qui passe par le canal de Suez. En effet, de Rabat au Maroc jusqu'à Mersin en Turquie, il n'y a qu'un seul peuple jouissant d'une histoire commune, d'une civilisation commune, d'une langue commune, le peuple arabe. Là se trouvent les possibilités d'une éventuelle renaissance nationale, et les ressources d'une probable puissance. ». Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’en l’état des choses en 1907, il ne s’agit que d’un projet impérialiste de l’État Britannique, et il n’est nullement question alors du peuple juif.
 
L’entrée en scène du pétrole et des sionistes¹
En 1901 est créé le Fonds national juif pour acquérir des terres en Palestine et y installer des colons juifs au moyen d’une collecte soutenue auprès de riches donateurs (juifs et non juifs, anglo-saxons notamment). Le bilan des terres achetées reste malgré maigre en raison en raison de la résistance des cultivateurs et propriétaires palestiniens.
En 1905, le mouvement sioniste (dans lequel les juifs sionistes russes sont majoritaires) décide, pour profiter des visées coloniales britanniques et française, que la Palestine sera le lieu d’établissement des juifs, après avoir écarté plusieurs hypothèses, dont celles de l’Argentine, de Chypre, de l’Ouganda. Plus tard, une fois mis en place le processus en collaboration avec les impérialistes britanniques, les sionistes refuseront la proposition du gouvernement soviétique (en mars 1928) de fonder une « région autonome juive » à l’Est de la Russie, sous le nom de Birobidjan.
C’est le 26 mai 1908 que le pétrole jaillit du sol iranien. L’événement se produit à Masdjed-e Soleyman, dans la province du Khuzestan, située dans le sud-ouest du pays, près de l’Irak actuel. C’est la première fois qu’un forage aboutit dans cette partie du monde. Sept ans plus tôt, le Britannique William Knox d’Arcy avait obtenu du chah de Perse une concession pour l’exploration du pétrole sur les trois quarts de son territoire. Donc, les capitalistes britanniques vont exploiter le pétrole. Et voilà qui leur donne une seconde raison de créer cette fameuse colonie, non seulement pour diviser le monde arabe, mais aussi pour mettre la main sur le pétrole. En 1909, la concession d’Arcy se transforme en une nouvelle structure, l’Anglo-Persian [1]Oil Compagny (APOC), qui devient l’Anglo-Iranian Oil Compagny (AIOC) en 1935, puis la British Petroleum Compagny (BP) en 1955.
Si la guerre en Europe est encore indécise, dès 1916 on sait que le sort de l’Empire Ottoman moribond est déjà réglé. C’est pourquoi les gouvernements français et britanniques se partagent les futures dépouilles, avec l’aval de l’Empire russe et du royaume d’Italie. Ce sont les accords Sykes-Picot (du nom d’un assistant du ministre des Affaires étrangères britannique et d’un diplomate français, chargés de négocier au nom des deux pays), accords secrets signés le 16 mai 1916. Ces accords prévoient de diviser les régions prises aux Ottomans ; le Proche-Orient est découpé, malgré les promesses d'indépendance faites aux Arabes, en cinq zones :
- Zone bleue française, d'administration directe formée du Liban actuel et de la Cilicie ;
- Zone arabe A, d'influence française comportant le Nord de la Syrie actuelle et la province de Mossoul ;
- Zone rouge britannique, d'administration directe composée du Koweït actuel et de la Mésopotamie (actuel Irak sans la région de Mossoul) ;
- Zone arabe B, d'influence britannique, constituée du Sud de la Syrie actuelle, de la Jordanie actuelle et de la future Palestine mandataire ;
- Zone brune, d’administration internationale, comprenant Saint-Jean-d’Acre, Haïfa et Jérusalem. Le Royaume-Uni obtiendra le contrôle des ports de Haïfa et d'Acre.
Ces accords n’ont pas de validité, mais ils seront confirmés par la toute neuve SDN (Société des Nations, ancêtre de l’ONU), lors de la conférence de San Remo. Auparavant, en 1919, le gouvernement français a cédé la région de Mossoul aux Britanniques, contre une participation aux bénéfices du pétrole que l’on a commencé à découvrir autour de Kirkouk, dans la même région. Les Britanniques possèdent donc l’ensemble de l’actuel Irak. La SDN attribue à la France et au Royaume Uni un mandat pour « conduire à l'indépendance » les peuples du Moyen-Orient « non encore capables de se diriger eux-mêmes », « en prenant en compte les vœux de ces peuples », selon le texte final de la Conférence. En réalité, le Royaume-Uni et la France n'ont pas tenu compte des vœux des populations et ont réprimé dans le sang les révoltes qui ont éclaté pendant leur mandat, notamment, en Irak, en Palestine et en Syrie. Les Britanniques obtiennent la gestion de la zone qui devait être internationale.
Entre temps, la nature de l’État tampon, que les Britanniques veulent placer au Proche Orient se précise. On commence à penser sérieusement aux sionistes. Les aspirations religieuses et culturelles des juifs, vont être d’autant plus efficacement instrumentalisées par les dirigeants britanniques et français que le contexte de la fin de la première guerre impérialiste mondiale est celui du mouvement ascendant du colonialisme pour poursuivre l’expansion du marché capitaliste. Pour les dirigeants impérialistes anglais et français, un État colonial juif en Palestine apparaît comme le moyen stratégique pour asseoir leur domination du monde arabe et sécuriser l’accès aux richesses de la région.
Theodor Herzl, auteur du programme de Bâle adopté lors du 1er congrès sioniste en août 1897, avait bien anticipé la stratégie des impérialistes anglais et français dans la région quand il a écrit : « Pour l'Europe, nous constituerons en Palestine un morceau du rempart contre l'Asie. Nous serions la sentinelle avancée de la civilisation contre la barbarie. ».
Le 4 juin 1917 le « Secrétaire Général des Affaires Étrangères » français (numéro deux du Quai d’Orsay), Jules Cambon, adresse une lettre au dirigeant sioniste Noam Sokolov dans laquelle il répond à son projet de « développer la colonisation juive en Palestine ». Il écrit notamment : « Le Gouvernement français, qui est entré dans cette guerre actuelle pour défendre un peuple injustement attaqué, et qui continue à lutter pour affirmer le triomphe du droit sur la force, ne peut que ressentir de la sympathie pour votre cause, dont la victoire est liée à celle des Alliés. Je suis heureux de vous donner ci-joint une telle assurance. ».
Le 2 novembre 1917, le secrétaire au Foreign Office (ministre britannique des affaires étrangères britannique), le conservateur Arthur Balfour, memebre d’un gouvernement d’union nationale présidé par le Libéral Lloyd-George, en concertation avec les pays alliés durant la 1ière Guerre mondiale, rédige une lettre, appelée Déclaration Balfour, dans laquelle « Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif, et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif , étant entendu clairement que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte ni aux droits civils et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, ni aux droits et au statut politique dont les juifs jouissent dans tout autre pays. ». La lettre est adressée à l’homme d’affaires fortuné, dirigeant sioniste juif, Lord Lionel Walter Rothschild, pour la faire connaître au Congrès sioniste.
Balfour écrira dans ses mémoires en 1922 (5 ans après sa déclaration) :
« Nous n’avions pas l’intention de tenir compte des sentiments des habitants actuels de la Palestine du fait que les quatre grandes puissances sont attachées au sionisme. Que le sionisme soit dans son droit ou non, bon ou mauvais, cela a une importance bien au-delà des souhaits des sept cent mille Arabes qui vivent actuellement en Palestine. ».
 
Le mandat britannique sur la Palestine (1920 – 1948)[2]
Désormais en charge de gouverner la Palestine, les Britanniques favorisent la venue de colons juifs qui achètent des terres aux féodaux ottomans ou arabes. D’importantes vagues de colons vont déferler en Palestine : 35.000 entre 1919 et 1923, 82.000 entre 1924 et 1931 et 217.000 entre 1932 et 1938.
Par ailleurs, ils ont organisé avec les Français, la division du monde arabe. A la place du « grand royaume arabe » qu’ils avaient promis au chérif de La Mecque et roi du Hedjaz (1/3 de l’Arabie), ils découpent en morceau le Proche Orient. La France sépare le Liban, devenu une république en 1926,  de la Syrie, sous protectorat de la puissance impérialiste. Les Britanniques créent, pour les fils cadets d’Hussein, le royaume d’Irak (pour Fayçal en 1921) dont ils détachent l’émirat du Koweït et le royaume de Transjordanie (pour Abdallah en 1921 émir, puis en 1946 roi, enfin roi de Jordanie en 1949). Mais par ailleurs, ils aident le roi du Nedjd (1/3 de l’Arabie, Abdelaziz ibn Séoud, à conquérir le Hedjaz, sur le fils aîné d’Hussein, Ali, conquête qui mènera à la création de l’Arabie Saoudite en 1932. La tactique de division a toujours été utilisée par les pays impérialiste au moment des soi-disant décolonisation, en réalité les rois d’Irak, de Jordanie et d’Arabie resteront des pions des Britanniques et, plus tard, des USA, lorsqu’ils prendront le relais. Les Britanniques mettent aussi la main sur le pétrole, découvert dans les années 30 en Arabie, au Koweït et à Bahreïn.
En mai 1933 : Nazis et dirigeants sionistes collaborent pour transférer d’importants capitaux juifs vers la Palestine avec la signature de l’accord dit de la Haavara (transfert) : les nazis au pouvoir en Allemagne, approuvent l’accord entre les compagnies d’assurances allemandes et juives et le pouvoir nazi pour organiser l’émigration des juifs allemands (fortunés) et le transfert de leurs capitaux vers la Palestine. Théodore Herzl avait déjà écrit : « Les antisémites seront nos alliés les plus sûrs et les pays antisémites nos alliés. »
Dans le même temps, l’administration coloniale britannique dénie toute identité nationale aux Palestiniens : tout au plus leur reconnaissait-elle une identité religieuse et culturelle.
En 1936, la population arabe de Palestine se révolte contre l’occupant britannique, c’est la Grande Révolte qui durera jusqu’en 1939. Les Britanniques constituent une commission pour venir en aide aux colons sionistes. C’est la commission Lord Robert Peel comme premier plan britannique pour doter les colons sionistes d’un État.
Le rapport de la commission (présenté en juillet 1937) préconisait de partager la Palestine en deux États : un État pour les juifs (ce qui n’était pas alors revendiqué en tant que tel par les sionistes, il s’agissait jusque-là d’un foyer) en leur octroyant 20 % de la Palestine et un État pour les arabes sur le reste.
C’est lors de cette Grande Révolte palestinienne de 1936 à 1939 que l’administration coloniale britannique promulgue la loi, dite loi spéciale, portant autorisation de la détention administrative. Cette loi (à peine actualisée dans son fonds) est toujours en vigueur en Palestine occupée.
 
Les USA prennent le relais des Britanniques[3]
De 1942 à 1948, les USA, comme puissance impérialiste hégémonique, entrent en scène et deviennent le principal sponsor de la colonisation sioniste. En pleine 2ième Guerre mondiale, les dirigeants sionistes anticipent la victoire des Alliés et l’émergence de la puissance états-unienne.
Début mai 1942 : le programme dit de Biltmore (New York) est adopté par le congrès sioniste (co-présidé par Ben Gourion), avec comme principales décisions :
― Une formulation officielle (pour la 1ière première fois) de la demande d’un État juif en Palestine (abandon de la formule foyer national juif) et de sa reconnaissance internationale ;
― La décision de la formation d’une force militaire sioniste aux côtés des Alliés, sous tutelle des États-Unis ;
― Le transfert du centre de l’activité sioniste internationale aux États-Unis, pour une alliance renforcée avec ce pays : le projet colonial sioniste et les visées états-uniennes de contrôle militaire et économique des richesses de la région du monde arabe constitueront désormais un seul et même objectif.
Deux déclarations des deux premiers dirigeants du mouvement sioniste expriment clairement le rôle du futur Etat sioniste comme base avancée de l’impérialisme occidental ; David Ben Gourion déclare en 1945 : « Si les Britanniques sont d’accord pour l’établissement d’un État Juif dans une partie de la Palestine, nous sommes prêts à leur donner une base contre la Russie. » ; Nahum Goldman (président du Congrès sioniste) déclare le 24 octobre 1945 : « Les sionistes s’engagent à donner tous les droits aux Britanniques pour établir des bases militaires maritime et aérienne en Palestine en échange de leur accord pour un État Juif sur 65 % des terres palestiniennes, et nous proposerons l’établissement de bases états-uniennes. ».
En février 1945, les dirigeants US signent un accord (secret, sur le croiseur USS Quincy) avec les dirigeants saoudiens : l’accord prévoit la protection du régime royal saoudien (avec l’érection d’une base militaire dans le royaume) en échange de l’accès au pétrole saoudien ; les dirigeants saoudiens pour leur part ne s’opposant à pas l’érection d’un État pour les juifs. Les États-Unis se placent de façon stratégique dans la région et vont devenir le principal soutien du futur État sioniste.
 
Le plan de partage, la création de l’État d’Israël et la Nakba[4]
Le 29 novembre 1947 les puissances impérialistes, à leur tête les Etats-Unis, décident de doter les juifs d’un État par le vote d’une résolution de l’ONU (n° 181). Le vote de la résolution a nécessité 2 tours : au 1er tour, il manquait une voix pour atteindre le quorum des 2/3 ; au 2e tour, après pressions et corruptions des USA (sur les Philippines, Haïti et le Libéria), la résolution est adoptée par 33 voix pour, dont celle de l’URSS, 13 voix contre (dont celles des pays arabes), et 10 abstentions (dont celles de la Chine, de la Yougoslavie et des pays d’Amérique du Sud). Si les Soviétiques ont ensuite, assez vite, changé d’avis, il faut noter l’erreur qu’a constitué leur vote, nous y reviendrons ultérieurement en tentant d’analyser ce geste.
C’est le plan de partage de la Palestine de 1947 en :
― Un État arabe : 12 000 km², 735 000 habitants, (dont 10.000 juifs, soit moins de 1,5 % de la population) ;
― Un État pour les juifs : 14 200 km², 905 000 habitants (dont 507 000 arabes, soit plus de 55 % de la population)
― Une zone internationale, Jérusalem : 205 000 habitants (dont 100 000 juifs)
Alors que les juifs ne représentaient alors que 35 % de la population totale vivant sur le territoire de la Palestine historique, et ne possédaient que 6 % des terres, l’entité sioniste se voient attribuer 55 % des terres. En quittant la Palestine, le 14 mai 1948, les Britanniques ont déjà placé les sionistes aux postes de commande du pouvoir administratif (mairies, cadastre, police, justice…). Cette reconnaissance internationale impulsée par les puissances impérialistes va autoriser les sionistes à ne pas se contenter de cette avancée : ils vont déployer le plan dit plan Dalet en menant des actions terroristes pour expulser les Palestiniens de plusieurs villes et à s’accaparer d’autres parties de la Palestine historique. Plus de 72 massacres seront perpétrés par les unités terroristes (Stern, Irgoun, Haganah…), dont celui de Deir Yassine (9 avril 1948).
Plusieurs centaines de milliers de Palestiniens ont été déjà expulsés du territoire contrôlé par les sionistes lorsque, le 14 mai 1948, alors que prend fin le mandat britannique, l’État d’Israël   proclame son existence et son indépendance. Cette expulsion massive et les massacres qui vont avec est appelée la Nakba (la catastrophe), au total, après la guerre israélo arabe de 1948, 800 000 Palestiniens seront expulsés et se réfugieront dans les pays frontaliers. A la suite de leur refus du plan de partage, les armées des États arabes (Egypte, Syrie, Irak, Transjordanie et des volontaires libanais) entrent en Palestine (le 15 mai) en soutien aux Palestiniens. Les colons sionistes sont appuyés par des mercenaires occidentaux, appelés « michalinks » ou volontaires (juifs et non juifs), évalués à plus de 3.500, provenant principalement des USA, de Grande Bretagne, du Canada, des colonies d’Afrique du Sud et d’Afrique du Nord.
Les forces sionistes s’assurent la victoire et conquièrent 78 % de l’ancienne Palestine mandataire (50 % de plus que ce que leur accordait le plan de partage). L’État palestinien décidé par l’ONU, même réduit, ne verra pas le jour : l’Egypte annexe la Bande Gaza et la Transjordanie devenue Jordanie annexe la Cisjordanie et Jérusalem Est. Il est important de noter que désormais, l’État sioniste atteint la mer Rouge et coupe en deux le monde arabe, séparant Le Caire de Damas, Bagdad et même Amman.
On comprend mieux l’intérêt vital qu’avaient les sionistes et leurs protecteurs US d’atteindre la mer Rouge à la lumière des événements de 1956. En réponse à la nationalisation (le 26 juillet 1956) du canal de Suez par le Président égyptien, Gamal Abdel Nasser, l’Angleterre, la France et l’État sioniste s’allient pour agresser l’Égypte. Pour des raisons diamétralement opposées, l’URSS, en soutien à l’Egypte et les USA, pour préserver leurs liens avec d’autres pays arabes (les trois royaumes) interviennent et mettent fin à l’agression. La nationalisation par un pays dirigé par des nationalistes arabes hostiles aux USA privait les multinationales US d’un accès facile à la mer Rouge via le canal.
 
En conclusion
La suite, nous avons eu déjà l’occasion d’en parler. Les USA ont soutenu, en 1967 et 1973, et après, ils ont soutenu toutes les actions de l’État d’apartheid, du leurre des accords d’Oslo au massacre actuel de Gaza en passant par la répression des différentes intifada, les emprisonnements massifs d’opposants politiques et les autres guerres faites à Gaza, après la mise en place du blocus. Et ils soutiennent aujourd’hui l’annexion par Israël de l’ensemble de la Palestine.
Ils soutiennent depuis le début l’État colonisateur dans sa démarche de colonisation, qui est une démarche spécifique, non pas une colonisation d’exploitation, comme la France en Algérie, mais une colonisation de substitution, le remplacement des autochtones palestiniens par des colons juifs émigrés d’Europe. Ils soutiennent l’État sioniste et lui permettent tout, tout simplement parce que c’est leur bébé, c’est leur flic au Moyen Orient, pour contrôler les matières premières, veiller à perpétuer la division du monde arabe, et désormais, mettre la main sur le gaz qui se trouve au large de Gaza, pour concurrencer le gaz russe.
Le plan des Palmerston, Campbell-Bannerman, Balfour est aujourd’hui en place, même si ce ne sont plus les monopoles britanniques qui tirent principalement les ficelles, mais les multinationales états-uniennnes.
Contrairement à ce que certains pensent, les sionistes ne dirigent pas les USA, ils sont au service des multinationales impérialistes. Ils sont un atout important, essentiel même, dans leur jeu. Mais c’est bien l’Oncle Sam qui commande et qui utilise Israël dans son action continue de domination du monde capitaliste depuis des décennies. Pas question pour les USA de laisser tomber le contrôle des ressources au Proche Orient, ni l’entreprise de division des peuples arabes. Biden peut bien y perdre ses élections, le capitalisme au stade impérialiste continuera de tourner aux USA, pour le plus grand bien des actionnaires des multinationales US.