N° 809 22/02/2022 Pour la deuxième fois depuis le début de l’année, l’Etat d’Israël a frappé la Syrie par un tir de missiles, dimanche 19 février. Ce sont des quartiers résidentiels de Damas qui ont été touchés.
La frappe a notamment visé le quartier de Kafr Sousa, une zone de haute sécurité qui abrite les sièges de services de sécurité et de renseignement. Un immeuble a été visé et un cratère béant était visible devant l'entrée du bâtiment.
Le ministère syrien de la Défense a fait état d'un bilan provisoire de cinq morts et 15 blessés. « À 00h22, l'ennemi israélien a commis une agression aérienne depuis le plateau du Golan (syrien) occupé, visant plusieurs secteurs de Damas et de ses environs, dont des quartiers résidentiels. […] La DCA syrienne a abattu plusieurs missiles. »
Des bâtiments historiques situés près de la citadelle de Damas ont été gravement endommagés à la suite de la chute d'un missile israélien, mais la citadelle est intacte.
Même si, comme à l’habitude, le gouvernement de l’Etat colonialiste n’a rien revendiqué ni commenté, la justification de ces attaques est à chercher dans la volonté de domination de l’Etat Israélien dans la région et des USA.
Ainsi, à la suite de la dernière réunion du conseil des ministres, Netanyahu a répété une nouvelle fois : « Nous ne laisserons pas l'Iran obtenir des armes nucléaires et nous ne le laisserons pas s'implanter sur notre frontière nord », sans mentionner les frappes de dimanche.
Israël continue de faire ce qu’il veut et les puissances impérialistes qui soutiennent l’Etat de l’apartheid, laissent faire, comme elles laissent faire la colonisation continue du territoire palestinien
La colonisation se poursuit et le Conseil de Sécurité s’en émeut vaguement
Le 12 février dernier, le gouvernement israélien a annoncé la légalisation de neuf nouvelles colonies et la construction de nouveaux logements dans les colonies existantes. La fuite en avant continue et la peau de chagrin de la "solution à deux Etats" a totalement fondu.
L’annonce, comme les frappes sur Damas, est significative du cynisme et de la totale impunité d’Israël et de son gouvernement : quoi que disent les uns et les autres, ils continuent.
Tout de même, ces neuf colonies ont ému jusqu’au Conseil de Sécurité de l’ONU. Après leur annonce, les Emirats Arabes Unis avaient préparé la semaine dernière un projet de résolution du Conseil de sécurité. Il visait notamment à ce que le Conseil « condamne toutes les tentatives d’annexion, y compris les décisions et mesures d’Israël concernant les colonies » et appelait « à leur retrait immédiat ».
Mais le mot "condamnation", entre autres, a irrité les représentants de l’impérialisme dominant US, qui menaçaient d’utiliser leur droit de veto. Le département d’Etat avait dénoncé une résolution « peu utile au regard du soutien nécessaire aux négociations sur la solution des deux Etats », tout en dénonçant l’annonce israélienne sur les neuf colonies.
S’en est suivi une négociation tripartite entre représentants des USA, des Emirats et de l’Autorité Palestinienne. Et la (petite) montagne a accouché d’une souris.
Le texte finalement adopté indique que : « la poursuite des activités de colonisation d’Israël met en péril la viabilité de la solution à deux Etats ». Le Conseil de sécurité découvre l’eau chaude !!! Enfin le Conseil « exprime sa profonde inquiétude et sa consternation » à propos de l’annonce israélienne du 12 février dernier. Cette déclaration n’a pas la portée contraignante de la résolution envisagée la semaine dernière qui mécontentait les Etats-Uniens. L’ambassadrice des Emirats Lana Zaki Nusseibeh a souligné, pour commenter la déclaration : « C’est la première décision (du Conseil) sur ce dossier depuis plus de six ans ». En effet, il existe une résolution de décembre 2016, votée y compris par les représentants US, où pour la première fois depuis 1979, le Conseil de sécurité avait demandé à Israël de cesser la colonisation dans les territoires palestiniens.
L’ambassadeur palestinien à l’ONU Riyad Mansour s’est satisfait du texte a minima. Il a souligné que l’important était d’avoir une « position unie » du Conseil. « Ce message doit être transmis et traduit en un plan d’action avec un calendrier pour des efforts de l’ONU et de ses Etats membres pour nous mettre sur un chemin différent vers la liberté, la justice et la paix », a-t-il déclaré au Conseil, alors qu’aujourd’hui « nous approchons rapidement d’un point de rupture ».
Il y a pourtant loin de la coupe aux lèvres, et, étant données la fréquence de ses interventions sur la question, et la volonté des USA d’empêcher mordicus qu’on touche à l’Etat colonial israélien, on voit mal l’ONU en faire plus que cette déclaration.
A l’image de leurs habitudes, les déclarations des dirigeants israéliens sont d’une violence et d’une mauvaise foi inouïe.
Le bureau de Netanyahou a dénoncé une déclaration « unilatérale niant le droit des Juifs à vivre dans leur patrie historique, ignorant les attentats terroristes palestiniens à Jérusalem au cours desquels 10 citoyens israéliens ont été assassinés. […] Les Etats-Unis n’auraient jamais dû se rallier à ce texte ». Quand-à l’ambassadeur israélien à l’ONU Gilad Erdan, il a accusé les Palestiniens « d’empoisonner les esprits de générations par des campagnes de propagande qui rendraient très fiers Goebbels et Hitler. » et d’ajouter : « La culture de la haine et de la terreur des Palestiniens est réelle. Comment ce Conseil peut-il justifier de l’ignorer ? ».
La déclaration finale, édulcorée sous la pression des Etats-Unis et d’Israël, est loin d’être la retentissante condamnation que la situation mérite. Par ailleurs, rien n’est prévu pour obliger Israël à renoncer à sa politique d’apartheid. Avec la poursuite des colonies, nous aurons son cortège d’asservissement et de massacre des populations palestiniennes. Et, comme nous l’avions déjà écrit, on peut constater que le discours des dirigeants actuel d’Israël, s’il maintient la fable de la patrie historique qui figurait dans le discours de leurs prédécesseurs, est désormais celui-ci : tous les territoires occupés font partie de cette soi-disant patrie historique. C’est donc une annonce de la poursuite de l’asservissement et de la mort de beaucoup de Palestiniens.
En Israël l’affrontement se poursuit à propos de la réforme de la justice
La Knesset a approuvé mardi 14 février en première lecture deux projets de loi pour une réforme du système judiciaire, deux textes qui modifient le processus de nomination des juges et introduisent une clause dérogatoire permettant au Parlement d’annuler à la majorité simple certaines décisions de la Cour suprême.
Le projet de réforme de la justice a été annoncé début janvier par le gouvernement, dirigé par Netanyahou et comprenant des fascistes. Le but de ces lois est double. D’une part, il s’agit de diminuer le pouvoir des juges pour qu’ils ne puissent nuire aux ministres corrompus, qui sont légion en Israël et spécialement Aryé Déry, le chef du parti religieux des séfarades Shas et Netanyahou lui-même. D’autre part il s’agit, pour la majorité ultra-réactionnaire au pouvoir, de gouverner sans entrave, dans un pays où il n’y a pas de constitution, mais où la Cour Suprême joue le rôle de cour constitutionnelle. Ce serait une première, dans une "république démocratique bourgeoise", de diminuer ainsi le pouvoir judiciaire.
Le projet et les deux textes mobilisent une forte partie de l’opinion publique contre eux. A Tel-Aviv, des manifestations ont lieu tous les samedis soir, rassemblant des dizaines de milliers de protestataires, signe d’une mobilisation massive à l’échelle de la taille du pays, qui dénoncent en bloc ce projet mais aussi la politique générale du gouvernement.
Lundi 20 février, la mobilisation a pris un tour plus important à Jérusalem et dans tout le pays.
Dès midi, des milliers de personnes se sont rassemblées près de la Cour suprême, du cabinet du Premier ministre et de la Knesset. Selon les organisateurs, environ 100 000 manifestants participèrent au rassemblement, censés encercler le bâtiment du gouvernement dans la soirée, à proximité des votes qui devaient se tenir au plénum de la Knesset.
Les manifestations ont commencé le matin avec le blocage des routes et même des maisons des membres de la Knesset. Les manifestants ont bloqué des dizaines d'intersections majeures à travers le pays entre 8h00 et 11h00, provoquant d’énormes embouteillages
De nombreux travailleurs ont fait grève (ou pris un congé) pour participer à des manifestations. En outre, il y a eu des protestations et des manifestations dans les établissements d'enseignement supérieur.
Dans la matinée, des manifestants ont bloqué la voiture du président du Comité constitutionnel. Dans le même temps, les manifestants ont également bloqué les maisons de députés de la Knesset partisans du gouvernement, ou encore celle du ministre de l'Agriculture.
Certains partis, comme le Parti Communiste Israélien mais pas seulement, dénoncent un coup d'État du gouvernement fascisant de Netanyahu et Ben Gvir. Il est même né une organisation intitulée « Bloquer le coup d'État », qui fait partie des organisateurs des manifestations. L’association, après avoir bloqué la maison d’une députée, a déclaré : « Nous continuons et continuons à bloquer le coup d'État. Dans notre corps, nous ne nous arrêterons pas tant que la loi ne sera pas abrogée. Le gouvernement actuel a déclaré la guerre à la démocratie israélienne et donc à nos droits fondamentaux à tous. C'est un gouvernement aux caractéristiques fascistes qui cherche à détruire le système démocratique dans lequel il a été élu. »
Si le mouvement est très large, il est tout de même ambigu. S’y côtoient des gens qui pensent la seule démocratie du Proche Orient, qui serait menacée, et d’autres qui combattent un Etat oppressif, notamment envers les citoyens arabes et les Palestiniens, qu’il pratique l’apartheid. Les uns défendent un leurre, les autres combattent un nouveau stade de la domination capitaliste et colonialiste qui va aggraver l’oppression.
Ainsi, parmi les porte-parole des manifestants il y a : l'ancien chef d'état-major israélien Moshe Ya'alon. D'anciens hauts responsables des services de sécurité rejoignent les rangs des "défenseurs de la démocratie" comme l'ancien premier ministre et chef d'état-major Ehud Barak. Il faut dire que l’armée à une certaine autonomie vis-à-vis du pouvoir politique en Israël, et que Netanyahou et ses amis fascistes comme Ben Gvir souhaitent rogner cette autonomie ; beaucoup d’anciens militaires sont donc présents dans ces initiatives. Pour ce qui est des porte-parole, on peut aussi citer Yair Golan, ancien dirigeant du Meretz (parti de gauche sioniste), Yair Golan, qui s’est engagé à « supprimer et faire taire » tous ceux qui cherchaient à faire du Meretz un parti commun aux juifs et aux arabes. Même des colons ont rejoint "la lutte pour la démocratie".
Les messages des porte-parole et de certains participants à ces manifestations, montrent que leur véritable objectif est de garder le régime d’apartheid israélien et que la communauté internationale continue à fermer les yeux sur les crimes qu'il commet.
Et, en même temps, les membres du bloc anti-occupation sont présents dans les manifestations et rappellent les faits de l’occupation.
Pour le Parti Révolutionnaire Communistes, seuls les peuples du monde peuvent aider à faire monter la pression contre l’Etat colonial israélien. Et, en France comme ailleurs, cela passe par exiger le boycott des produits israéliens et la rupture des relations diplomatiques avec Israël.