N° 839 21/09/2023 En une semaine, 12.000 réfugiés sont arrivés sur l’île de Lampedusa en Italie. Premier port d’escale pour les réfugiés venant d’Afrique du Nord et constitue une des principales portes d’entrée de l’Europe. Au total, depuis le début de l’année, plus de 124.000 réfugiés sont arrivés en Italie par la mer contre 65.000 à la même période l’année dernière et 41.000 en 2021.
L’île de Lampedusa a une superficie d’environ 20 kilomètres carré et son centre destiné aux réfugiés a une capacité d’environ… 400 places ! Les milliers de réfugiés n’ont pas d’autre choix que de s’entasser les uns sur les autres en attendant de voir leur demande d’asile être traitée par l'administration. Tous viennent de pays ou des conflits régionaux font rages, comme la Guinée, la Côte d’Ivoire, la Tunisie, l’Égypte, le Pakistan, la Syrie, le Cameroun, le Mali, le Soudan où les affrontements récents ont fait quatre millions de déplacés dans le pays, son voisin le Tchad a vu arriver 400 ,.000 nouveaux réfugiés. Il s'agit donc clairement de questions de survie pour des millions et des millions d'hommes de femmes et d'enfants qui ne voient leur salut que dans le départ de leur pays d'origine dans des conditions inhumaines qui mettent en danger leur vie (1). Ces hommes, ces femmes, ces enfants sont-ils responsables des guerres, de la répression et de la misère? Non, ils en sont les victimes, celles des luttes que se mènent les États capitalistes au sein du système impérialiste pour asseoir leur domination, contrôler les sources de matières premières, les marchés, les voies de communications et la force de travail.
Pour augmenter les profits, les capitalistes ont deux choix : la délocalisation de la production ou l’immigration. Deux facettes d’utilisation de la réserve mondiale de main d’œuvre. L’accueil de réfugiés par les gouvernements européens est donc calculé économiquement. Ainsi, le gouvernement de Meloni, en même temps qu’il parquait des milliers de réfugiés dans des camps aux conditions de vie inhumaines, augmentait les quotas d’entrée pour les travailleurs migrants non-européens à 452.000 pour 2023-2025, contre environ 83.000 en 2022. Une décision clairement liée au contexte de diminution de la population et de pénurie de main-d’œuvre en Italie, un calcul qui montre tout le cynisme des classes dirigeantes.
Pour exploiter au maximum la main-d’œuvre, qu'elle soit immigrée ou non, rien de mieux que de la diviser. En France, le futur projet de loi sur les questions de l'immigration est un révélateur puissant des intentions des forces politiques du capital dans un moment marqué par les luttes des travailleurs contre la réforme des retraites, les salaires. Ce principe est le fondement même des volontés qu'ont les forces politiques du capital de faire en sorte que s'affrontent les travailleurs entre eux et non contre leurs exploiteurs capitalistes communs. Les surenchères politiciennes abondent du gouvernement aux Républicains, à Renaissance et au Rassemblement National. Les forces regroupées dans la NUPES ne posent pas la question de la responsabilité du capitalisme et s'en tiennent à un discours moralisateur sans aller au fond des choses. Le secrétaire général du PCF allant jusqu’a réclamé « un consensus républicain » et appelé à “renforcer la protection des frontières” pour que « les Français se sentent en sécurité ». Tout comme la droite et l’extrême-droite instrumentalisant la situation pour déverser leur venin xénophobe et défendre des mesures toujours plus racistes et répressives. Pour Matteo Salvini, vice-président du conseil des ministres en Italie, l’arrivée de tant de migrants représente ainsi un « acte de guerre ». En France, Marine Le Pen n’a pas tardé à lui emboîter le pas tweetant: « Qui refusera encore de parler de submersion quand il arrive en quelques heures l’équivalent de la population d’une île…». Faisant écho à celle de sa nièce de Reconquête parlant de « défi civilisationnel » et expliquait « Ce n’est que le début [...], on peut parler d’une submersion migratoire. »
Des théories complotistes et racistes du « Grand remplacement », les pays d’Afrique qualifiés d’« instables » et dont proviennent ces milliers de réfugiés ont été et sont déstabilisés depuis des décennies par la guerre, l’exploitation et le pillage des ressources, que ce soit par les interventions militaires en Syrie, en Irak, en Libye ou par la mainmise néocoloniale de pays comme la France sur des pans de continent entier comme l’Afrique de l’Ouest, où des milliers de troupes françaises sont encore postées aujourd’hui. Sans compter les changements climatique, face auxquels, les grandes entreprises et les gouvernements des pays impérialistes sont les premiers responsables et ne font rien, exploitation et profit sont leurs priorités.
Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne, s’est rendue, elle aussi en Italie. Elle a proposé à Giorgia Meloni un plan en dix points qui a pour but de renforcer les frontières le plus rapidement possible notamment avec le renforcement de Frontex(2). Un appui politique aux gouvernements ouvertement racistes de Meloni en Italie et Mitsotakis en Grèce. Dix points qui reprennent les orientations décidées en conseil européen. Les propositions de Darmanin sont une déclinaison de cette orientation de la réforme du système de l’immigration au sein de l’Union Européenne. Il a annoncé que la France allait renforcer les patrouilles de la police et de l’armée le long de sa frontière avec l’Italie. L’Allemagne a aussi annoncé suspendre « jusqu’à nouvel ordre » l’accueil de demandeurs d’asile en provenance d’Italie.
La réponse de l’UE est de sécuriser les accès à ses frontières et d’accélérer les expulsions. La macronie marche main dans la main avec des gouvernements d’extrême-droite comme celui de Meloni.
Les facteurs qui alimentent l'immigration sont liés à des situations de guerre, de répression et de misère. Les premières victimes ce sont les réfugiés. Les peuples paient les affrontements impérialistes.
S’il y a urgence à dénoncer la responsabilité des pays impérialistes, il convient aussi d'aller plus loin dans l'analyse s'agissant d'une des questions centrales de la capacité du capital à disposer d'une force de travail la moins coûteuse possible. Sa qualification peut être utiles à des pays de l'Union Européenne en berne démographique et permettant donc une augmentation des taux de profits extraits de l'exploitation du travail salarié. Dans ce contexte, il est plus que jamais impératif de se battre. Le capitalisme est incapable de résoudre les problèmes posés à l’humanité. Des peuples, des hommes et des femmes mènent le combat contre celui-ci et seule la lutte des classes anticapitaliste peut faire bouger la situation.
Nous rappelons avec force, il n'y a qu'une classe des travailleurs face à la classe capitaliste qui est leur exploiteur commun. Tous les salariés doivent avoir les mêmes droits et se rassembler dans la lutte commune pour les revendications et pour en finir avec le système d'exploitation capitaliste en France et dans le monde.
(1)Rien qu’en 2023, plus de 2000 personnes sont mortes ou portées disparues dans la méditerranée.
(2)Frontex est l’Agence de garde-côtes et de garde-frontières de l’Union européenne (UE). Son siège est basé à Varsovie en Pologne, et son conseil d’administration est composé de représentants des Etats membres de l’UE et de la Commission européenne. Sa mission principale est d’assurer la gestion européenne des frontières extérieures et d’accroître l’efficacité de la politique d’expulsion de l’UE.