Gantry 5

 

N° 842 12/10/2023 Discuté à partir de la mi-octobre à l’Assemblée nationale, pour une adoption avant le 30 novembre, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 confirme l’orientation du gouvernement dans sa politique d’austérité. Le budget de la Sécurité sociale s’élève à 640 milliards d’euros. Les deux gros postes sont les retraites : (294 milliards d’euros) et la maladie (252 milliards d’euros).
Le bilan financier de la Sécurité sociale au sens large (régime général des salariés, autres régimes de base obligatoires, régimes de retraite complémentaire, chômage, caisse d’amortissement de la dette sociale – Cades –, Fonds de réserve pour les retraites...) est excédentaire de 0,6 point de PIB (soit 15,8 milliards d’euros). Le déficit global est estimé à 8,8 milliards d’euros, en cause les fonds de solidarité vieillesse du aux baisses et suppressions des  cotisations sociales.
L’objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Ondam) est fixé à 255 milliards d’euros pour 2024, soit 3,2 % d’augmentation par rapport à 2023, il ne tient pas compte de l’inflation. L’essentiel des dépenses de santé concerne la rémunération des soignants. Ça veut dire qu’il n’y aura pas de revalorisation des salaires à l’hôpital ! Quant aux médecins, le texte ne fait référence qu’au règlement arbitral qui prévoit une augmentation de 1,50 euro de la consultation ! Des discussions doivent reprendre alors que l’enveloppe est bouclée. Les arbitrages seront donc pris contre les patients, par exemple sur les franchises médicales, absentes du PLFSS.(1)
Dans le projet de loi, le gouvernement prévoit de faire 3,5 milliards d’économies, volées dans le portefeuille des patients et des salariés avec 1,3 milliard d’euros de « transferts de dépenses et de responsabilisation des assurés », au premier rang, la modification du ticket modérateur pour les soins dentaires. A compter du 15 octobre, l’Assurance maladie ne remboursera plus que 60 % du tarif sur les soins dits conservateurs au lieu de 70 % actuellement. A charge ensuite pour la complémentaire santé de rembourser le reste. La mesure va creuser les inégalités dans l’accès aux soins dentaires et renchérir le coût des complémentaires.
Poursuite de l’asphyxie de l’hôpital public.
Le budget des hôpitaux doit augmenter de 3,2 % en 2024, c’est-à-dire de 3,1 milliards d’euros. Il passerait ainsi de 102,5 milliards d’euros en 2023 à 105,6 milliards d’euros.
De nombreuses mesures ont été annoncées pour l’attractivité des métiers, revalorisation du point d’indice, rehaussements dans les grilles, prime pour le pouvoir d’achat… à hauteur de 1,7 milliard d’euros. En ajoutant les 1,1 milliard d’euros annoncés fin août pour la revalorisation des gardes de nuit et des astreintes… il reste donc seulement 300 millions d’euros pour faire face à l’inflation, aux innovations thérapeutiques et à l’augmentation des besoins. De plus le gouvernement prévoit de demander 500 millions d’euros d’économie à l’hôpital au nom de l’efficacité, de la capacité de rendement... Les hôpitaux ne pourront pas faire face à l’inflation, notamment aux coûts de l’énergie. Il manque déjà 585 millions en 2023 pour y faire face et 700 millions d’euros pour couvrir les différentes mesures engagées pour les rémunérations (Ségur, augmentations indiciaires…). On le voit, le gouvernement fait des annonces de revalorisation mais sans donner les moyens supplémentaires aux hôpitaux. Ceux-ci n’ont alors pas d’autre choix que de serrer les cordons de la bourse, d’emprunter, de rationner les soins, augmenter la productivité des personnels ou faire de la « modération salariale » en clair ne pas augmenter les salaires, réduire sur les achats c’est-à-dire la restauration et le ménage…
Le budget alloué à la création de postes, notamment dans les EHPAD avec la création de 6.000 postes, est totalement insuffisant. C’est moins d’un poste par établissement !!!, un net décalage face à l’urgence de la situation.
Toujours plus d’économies sur les soins, aucun moyen pour la santé.
Macron poursuit le projet de privatisation de l’hôpital. En annonçant une sortie partielle de la tarification à l’activité (T2A), système qui prévoit un « prix » pour chaque acte médical réalisé plutôt qu’une logique de financement global va faire reculer certaines activités, comme les urgences ou les soins critiques. Activités qui seront reprises par les établissements privés, non éligibles aux nouvelles tarifications.
Le gouvernement cherche à désigner des coupables à qui faire payer la crise économique tout en continuant à faire des cadeaux au patronat. Les gagnants du projet de loi, ce sont les laboratoires pharmaceutiques(2) à qui le gouvernement veut offrir 500 millions d’euros et les patrons qui eux, vont être exonérés d’une partie des indemnités qu’ils doivent verser aux salariés en cas de maladies professionnelles ou d’accidents du travail.
Le gouvernement entend renforcer la répression des salariés malades.
La chasse aux arrêts maladie dans le viseur du gouvernement. Les indemnités journalières maladie coûteraient trop cher : elles sont passées de 11 milliards d’euros en 2010 à 16 milliards en 2022 au lieu de prendre des mesures sur les conditions de travail, il serre la vis. En téléconsultation(3), un arrêt de travail ne pourra plus excéder trois jours, à moins d’être prescrit par le médecin traitant. Les contrôles des arrêts maladie seront par ailleurs renforcés, et il sera possible de suspendre automatiquement les indemnités journalières en cas de rapport du médecin contrôleur délégué par l’employeur qui jugerait l’arrêt injustifié.
Depuis 30 ans, la multiplication des dispositifs d’exonération de cotisations pour les patrons (estimées à 75 milliards d’euros pour l’année 2022(4)) assèche les recettes et fait reculer les droits de patients : baisse considérable des prises en charge, des remboursements, recul des droits des patients à des soins de qualité. D’un financement basé sur les richesses produites par les salariés on est passé au fil des ans et des réformes anti sociales à un financement par l’impôt et les taxes. Exemple en supprimant les exonérations de cotisations sociales sur les salaires supérieurs à 2,5 SMIC, adoptées au nom de la compétitivité qui n’ont produit ni gains d’emplois, ni de compétitivité, souligne un rapport du Conseil d’analyse économique confirmé par France Stratégie. Elles ont permis aux entreprises d’augmenter leurs profits et les salaires de leurs cadres. Revenir sur ces exonérations permettrait de faire rentrer deux milliards d’euros dans les caisses de la Sécu.
Cadeau du gouvernement au patronat dans le projet de loi à l’article 39 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale concernant les accidents du travail, il limite la portée de la faute inexcusable de l’employeur : une indemnisation réduite pour les victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles et aucune pénalité financière supplémentaire pour les patrons « négligents ». Le PLFSS a toutes les chances d’être adopté via le 49-3 et dans la version souhaitée par l’exécutif. Tous les ans, près de 600 000 personnes sont accidentés au travail et 55 000 contractent une maladie professionnelle. Et pour 3 000 d’entre elles, la faute inexcusable est reconnue. Il s’agit souvent de pathologies sévères et de cancers professionnels, lourds de conséquences pour les salariés concernés.
Stop ! Il ne faut pas les laisser faire.
La détermination du gouvernement à s’attaquer à nos conditions de vie, de travail et à notre accès à la santé, pour faire des économies, se poursuit par la casse de l’hôpital public, une restriction de l’accès au soin pour les plus précaires, avec l’objectif de la privatisation du système de santé.
Un projet toxique et mortel contre lequel il faut construire une réponse à la hauteur et pas dans le dialogue social. Il est urgent de changer le rapport de force, les mobilisations contre la fermeture des services d’urgence se multiplient, il faut articuler les luttes pour, les services publics, les mobilisations contre la vie chère avec celles pour les salaires et le refus des offensives autoritaires
Cette société ne peut pas générer le progrès pour tous, répondre aux besoins des peuples. Il faut la dégager de l’emprise totale du capital et pour cela lutter de plus en plus fort, partout et tous ensemble jusqu’à créer un autre rapport de forces pour qu’enfin les richesses reviennent à ceux qui les ont produites.
Ces luttes, nous les inscrivons dans la perspective d'arracher les moyens de production et d’échanges au capital pour que les fruits du travail bénéficient enfin au peuple.
(1) Certaines mesures annoncées début septembre (doublement des franchises médicales: de 0,50 euro par boîte à un euro et mise en place de forfaits de consultation chez le généraliste – d’un à deux euros) ne figurent pas dans le texte présenté. Ces mesures rapporteraient 700 à 800 millions d’euros à la Sécurité sociale. Une mesure scandaleuse qui viendra augmenter le budget santé des personnes souffrant de maladies chroniques ayant besoin de médicaments tous les mois.
(2) Pour répondre aux pénuries de médicaments qui s’approfondissent d’année en année, le gouvernement veut permettre aux préfectures de prendre des arrêtés de délivrance à l’unité. Il ne touche pas aux racines du problème, à savoir les laboratoires pharmaceutiques qui orchestrent des pénuries pour leurs profits.
(3) Les déserts médicaux pour les médecins généralistes touchaient 1,7 millions de personnes en France en 2022  la téléconsultation représente une alternative.
(4)S’y ajoutent au moins 10 milliards d’euros de manque à gagner pour la Sécurité sociale du fait des exemptions d’assiette. Les exonérations de cotisations c’est aussi la transformation du CICE en exonérations de cotisations et sa pérennisation environ 20 milliards d’euros par an.
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