Gantry 5

 

     Depuis plusieurs semaines, de Nantes à Clermont-Ferrand en passant par la région parisienne, des enseignants se mobilisent par la grève, essentiellement dans le premier degré, contre la loi Blanquer. Des grèves minoritaires mais pas négligeables se poursuivent ici et là et deux journées fortes ont marqué le climat social dans l’Education nationale : le 19 mars, à l’occasion de la grève interprofessionnelle et le 4 avril, journée purement « éducation », lancée au départ par des AG de grévistes avec 35 à 40 % de grévistes dans tout le pays et près de 60 % en région parisienne.

     Les vacances scolaires et les fameuses zones ralentissent bien sûr le phénomène, mais des grèves se poursuivent dans les endroits où les enseignants ne sont pas encore en vacances et la journée fonction publique du 9 mai sert de point d’appui et de date butoir pour commencer une vraie grève reconductible nationale.
     Au-delà de la loi Blanquer, c’est tout un ensemble de ras-le-bol qui se conjuguent face à la politique de Blanquer et de ses prédécesseurs. La baisse des créations de postes, les effectifs qui montent hors des CP et CE1 dédoublés, les fermetures de classes et d’écoles en zone rurale, le mépris du ministre, les pressions de la hiérarchie, tout cela fédère une colère sourde et noire.
     La mise au pas idéologique des enseignants, l’obligation plus ou moins assumée par l’administration de faire partout la même chose et, par exemple, surtout pas de permettre aux enfants de devenir lecteurs ne datent pas de Blanquer. Les autres avant, s’en étaient déjà bien occupés. Mais, avec l’ancien directeur de l’ESSEC, nous franchissons une étape considérable. C’est d’ailleurs ce que porte l’article 1 du projet de loi : « Sois prof et tais toi ! », comme le dit la CGT Educ, ou encore applique les consignes. Les enseignants du primaire sont considérés par Blanquer et son idéologue favori, le neuro-scientiste Dehaene, comme des exécutants destinés à appliquer des protocoles décidés en-dehors deux et d’ailleurs en-dehors de l’Ecole. Et, pour être sûr qu’ils ne sortiront pas de ce rôle, c’est la caporalisation. On s’apprête donc à surveiller ce que font les instituteurs et professeurs des écoles en classe, mais aussi ce qu’ils disent publiquement, notamment sur ce que l’on appelle les « réseaux sociaux ».
     C’est tout cela qui déclenche la colère et la lutte, avec un motif particulier lié à la création possible des EPSF (établissements publics des savoirs fondamentaux). Ils regrouperaient un collège et les écoles qui l’alimentent en élèves et les enseignants du primaire seraient placés sous l’autorité d’un supérieur hiérarchique nouveau, un adjoint « premier degré » du principal du collège. Au-delà de la possible disparition des directeurs d’école (mais rien n’est moins sûr, car ils font vivre le système, qui a besoin d’eux), la vraie menace avec cette création est triple : ― l’ossification du système du socle commun avec la notion, inepte pédagogiquement, de « savoirs fondamentaux », une école obligatoire s’arrêtant à la troisième pour nombre d’enfants, ceux des milieux populaires ― la territorialisation, dans la foulée de la réforme des rythmes scolaires, des communes riches et des départements pourraient devenir ordonnateurs de l’éducation (certaines métropoles sont prêtes) ― la fin de l’exception école, d’un fonctionnement en autonomie, avec un supérieur hiérarchique peu présent, et parfois démocratique.
     Le syndicat majoritaire du primaire, le SNUipp-FSU, qui n’est pas vraiment connu pour son amour des luttes (il avait soutenu la réforme des rythmes scolaires) a manifestement pris la mesure du mécontentement, de l’envie de lutter et joue le jeu du développement de la lutte. Les syndicats de lutte, CGT et SUD ainsi que le SNUDI-FO sont également sur le pont pour mobiliser : la journée du 4 avril était à l’appel de ces quatre organisations.
     C’est difficile de faire reculer Macron, ou son ami Blanquer, nous en avons l’expérience depuis deux ans. Mais quelque chose est en train de naître, une contestation sourde est en train de devenir vivace, publique, de sortir des placards où elle était reléguée. L’idée, chère au Parti Révolutionnaire Communistes, que seule la lutte paie, que la grève est le seul moyen d’action pour gagner émerge de nouveau, retrouve une place qu’elle avait un peu perdu dans le milieu.
     On ne sait pas ce que demain nous prépare, mais une grande mobilisation des enseignants, notamment du primaire, après le 9 mai peut se développer.
Le Parti Révolutionnaire Communistes suit de près l’évolution du mouvement, il soutient cette lutte juste, sous toutes les formes qu’elle prend, des grèves locales aux journées nationale en passant par une grève durable.

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