N° 800 20/12/2022 Interview de Jean Pierre Lalbat, Secrétaire des syndicats retraités CGT de Paris
Question 1 : Le gouvernement veut imposer un recul de l'âge de départ à la retraite jusqu'à 65 ans, avec une augmentation de la durée de cotisation. Il invoque la nécessité de sauver le système des retraites. Qu'en penses-tu?
Jean Pierre Lalbat : En effet, le gouvernement revient à la charge en expliquant que le financement des retraites est mis en cause et qu'il faut donc renflouer le système. Il ajoute même que ce serait une mesure de justice permettant aux générations futures d'en profiter. Le système n'est pas déficitaire, en réalité il n'y a pas de problème de financement, c'est ce que montrent les projections du Conseil d'Orientation des Retraites (COR). L'objectif du gouvernement et il ne s'en cache pas c'est que les salariés travaillent plus et plus longtemps. Le patronat le veut pour arrondir ses profits, le gouvernement le met en musique!
Question 2 : Face à une telle attaque qui concerne tous les salariés, comment vois-tu la riposte?
Jean Pierre Lalbat : L'attaque n'est pas spécifique aux retraites. Il s'agit d'un ensemble cohérent de mesures qui visent à faire baisser le prix de la force de travail que traduisent les salaires directs et le salaire que l'on nomme socialisé et qui comprend les retraites et la protection sociale. Ainsi, le gouvernement par sa réforme de l'assurance chômage a amputé de manière significative les droits des chômeurs. Il cherche à revenir sur les 35 heures...L'attaque est donc globale contre les salariés. Face à toutes ces attaques, aux ravages de l'inflation sur le pouvoir d'achat, les salariés ne se laissent pas faire et l'on voit bien que les luttes nombreuses ont pour objectif un meilleur salaire. Ce que veulent les salariés, c'est un bon emploi, un bon salaire, une bonne protection sociale et une bonne retraite. Tout est donc lié et c'est ce que nous devons porter dans les luttes.
Question 3 : Le gouvernement à du renoncer, du fait des luttes, à une réforme globale dite par point. Mais il est clair qu'il n'a pas cessé de revenir à la charge avec l'objectif de frapper les futurs retraités au portefeuille, alors pourquoi ce retard à l'allumage dans l'action?
Jean Pierre Lalbat : En 2019, le gouvernement a voulu mener une réforme du système de retraite visant à mettre en œuvre un système par point qui aurait largement défavorisé les salariés. Les mobilisations de 2019 et 2020 l'en ont empêché. Il revient donc à la charge sous forme de mesures paramétriques dont l'objectif est le même, travailler plus et plus longtemps pour gagner moins avec en prime la baisse des pensions! La réforme que veulent patronat et gouvernement, comme la précédente, ouvre la voie à la retraite par capitalisation dont le caractère inégalitaire et couteux, sans compter les risques, n'est plus à démontrer. Alors, oui il faut développer l'action de masse des salariés en s'appuyant et en développant les actions en cours, en frappant fort et tous ensemble.
Question 4 : Si les salariés et les retraités peuvent mesurer les graves conséquences des projets du gouvernement, par contre beaucoup de jeunes semblent résignés à ne pas avoir de retraite. Comment s'adresser à eux pour qu'ils soient aussi dans l'action ?
Jean Pierre Lalbat : Ce qui est en jeu ce sont les conquêtes sociales que les salariés et ceux qui sont maintenant retraités ont arraché par leurs luttes. Ces conquêtes sont basées sur l'idée de solidarité entre les salariés et les générations. C'est pourquoi salariés en activité et retraités ont les mêmes raisons à rentrer dans l'action au coude à coude pour défendre les droits qu'ils ont arrachés par la lutte au capital. Les jeunes ont les mêmes intérêts qu'ils soient encore en formation ou dans la vie active. Les conditions de travail et d'études, la nature des emplois précaires ou non, les salaires, la protection sociale sont aussi les éléments déterminants de leur vie personnelle et sociale. Il est positif que des organisations de jeunesse appellent elles aussi à la lutte.