Gantry 5

 

SANOFI est une transnationale française. L’entreprise détient la 3e position mondiale dans le secteur de la santé avec un chiffre d’affaire de 35 milliards d’Euros en 2018. Elle pointe en 11e position pour la capitalisation boursière avec 99 milliards d’Euros. Elle est leader dans toute une série de spécialité médicamenteuse et des vaccins. Elle réalise 72 % de son chiffre en dehors de l’Europe, elle compte 100.000 salariés dans 100 pays et 25.000 salariés en France.

Son investissement en recherche est de l’ordre de 5,9 milliards d’Euros en 2018 soit environ 17 % de son chiffre d’affaire. La société s’est profondément restructurée dans la dernière période avec ,en France, une perte de 2.000 emplois tout particulièrement dans le secteur de la recherche. Elle bénéficie depuis 2008 d’un Crédit Impôt Recherche (CIR) d’environ 130 millions d’Euros par an. L’entreprise a été dans la dernière période sous les feux de l’actualité avec un versement de dividendes importants à ses actionnaires en pleine crise sanitaire et tout récemment fait l’objet d’une polémique sur la première exclusivité d’un éventuel vaccin contre Covid19 aux USA. Pour en savoir plus, nous avons posé quelques questions Pascal Collemine délégué syndical central CGT à Sanofi Recherche§Développement.

     1. Sanofi est le 3e groupe mondial dans le secteur de la santé et la 11e capitalisation boursière dans le monde. Le groupe est internationalisé et s’est profondément restructuré avec           une diminution sensible en France des emplois en particulier de recherche. Qu’en est-il au juste ?

En 10 ans, les effectifs en Recherche&Développement (R&D) ont quasiment diminué de moitié. Il y avait 6300 salariés en 2008, il n’y aura plus que 3500 fin 2020. Le nombre de centres de R&D est passé de 11 à 4.
Sanofi va fermer encore un site spécialisé dans la sécurité du médicament (Toxicologie ) en fin d’année dans le cadre du dernier plan de restructuration. La direction a aussi engagé une forte externalisation de nos activités de R&D, de nombreux métiers en interne disparaissent au profit d’entreprises sous-traitantes (en anglais C.R.O) comme EVOTEC qui a maintenant repris l’intégralité du site de Toulouse. Sanofi, lors du plan de 2012, s’est désengagé de ce site. Ils ont cédé les bâtiments, les matériels et le personnel restant à l’époque à une société allemande du nom d’EVOTEC. Les frais de personnel ont été payés de plus par Sanofi pendant 5 ans en échange de travail de sous traitance.

     2. Quelles sont les orientations générales de la production de SANOFI aujourd’hui ?

Les orientations générales sont de plus axées autour des produits biothérapeuthiques, et notamment en Oncologie et Immuno-oncologie. Les axes de recherches en Neurologie (Alzheimer), en cardiologie, en infectiologie et récemment dans le diabète ont été externalisés. Le « marché » n’est pas assez juteux pour les actionnaires. Il faut des produits qui coûtent plusieurs milliers d’euros pour générer les profits !
La Chimie médicinale (des petites molécules) disparaît peu à peu car ce n’est pas assez rentable. Les traitements bio thérapeutiques valent une fortune ! C’est en partie pour cette raison que la stratégie de Sanofi est orientée dans ce domaine afin de pouvoir générer beaucoup de cash (si les systèmes de santé remboursent, ce n’est pas forcément gagné …)
Il faut remarquer que les approches immunologiques sont une réelle avancée dans le traitement du cancer et d’autres maladies. C’est une approche personnalisée mais les petites molécules ont encore de l’avenir (beaucoup plus simple à produire mais facilement copiables) et peu chères donc plus accessibles pour les pays du Sud par exemple. Un traitement biothérapeuthique, vu son prix, ne sera certainement vendu que dans les pays riches. C’est un gros problème d’accès au médicament !

     3. Quelles sont les conséquences des restructurations pour l'entreprise en France et sur la recherche dans le domaine des médicaments. Est-ce qu'ils ont arrêté la production de                certains types de médicaments ces dernières années pour des raisons de rentabilité ?

La R&D se meurt en France. On assiste à un véritable démantèlement de nos activités de recherche qui n’est absolument pas remis en cause par l’État. Le gouvernement Macron accompagne les décisions de Sanofi. Il ne faut pas oublier que Macron a un lien tout à fait privilégié avec Serve Weinberg, président du conseil de surveillance. Une réunion du cercle des entreprises a eu lieu en présence du 1er ministre peu après l’élection de macron au centre de recherches de Vitry. Il y avait tous les grands patrons français à cette réunion…
En termes de production, les principes actifs ont été externalisés depuis longtemps (Paracétamol par exemple).
Nous n’assistons pas vraiment à de nouveaux arrêts de production en France. La direction a de plus en plus tendance à produire un peu partout en Europe et aussi dans les pays à bas coûts mais la récente pénurie de médicaments va obliger la direction a rapatrier plus de production en Europe. Cependant, ce nouveau groupe sera financé à hauteur de 30 % par Sanofi (projet Pluton)
Deux usines pourraient quitter le groupe (Vertolaye et Elbeuf), encore une diminution de la masse salariale et une perte de savoir-faire en interne. La CGT combat bien sur ce projet qui pourrait être financé entièrement par le Groupe. Les 4 milliards € de bénéfices dégagés en 2019 seraient bien utilisés.

      4. Sanofi puissante multinationale dans le système de santé est-ce compatible avec la réponse aux besoins de santé ? Que proposez -vous?

La CGT propose que le médicament fasse partie d’un pôle publique. Notre santé ne doit plus être confiées aux rapaces de la finance. Les besoins en santé publique sont encore conséquents, de nombreuses maladies ont besoin de traitement accessibles à tous. Le capitalisme et les profits sont contraires à une politique de santé accessible à tous, et notamment pour les pays du Sud ou en voie de développement. Il faudrait réquisitionner des usines, surtout dans la période actuelle, et pourquoi pas recourir à la licence d’office afin de produire des médicaments essentiels pour la santé.

      5. Ces choix semblent validés par des profits importants si l’on s’en réfère aux dividendes distribués y compris très récemment, mais qu’en est-il de l’emploi en nombre et en                      qualité  et des conditions de travail en général et en France en particulier ?

L’emploi diminue fortement depuis une dizaine d’années, plus de 5000 postes ont été supprimés en France dans le groupe (toutes les activités sont compressées). De nombreuses expertises ont disparus en R&D notamment avec le recours aux plans de restructurations. Il n’y a quasiment plus aucune embauche de jeunes chercheurs, la pyramide des âges est une véritable toupie. Les plans de départ en mesures d’âge permettent aux plus anciens de partir sans aucun remplacement. C’est un désastre pour la transmission des expertises qui sont indispensables dans nos métiers
Les orientations stratégiques de Sanofi ne sont pas comprises par les salariés (même à un niveau hiérarchique élevé), les salariés ne pensent qu’à quitter le groupe, avec des bonnes mesures d’accompagnement que la CFDT négocia au plus haut à chaque fois (pour les plus anciens). Les quelques plus jeunes vont dans d’autres laboratoires plus offrant ou dans les boites sous-traitantes qui elles recrutent mais avec un statut révisé à la baisse.

      6. Les déclarations récentes de Paul Hudson sur le vaccin contre Covid19 ont ému et donné lieu à un large concert de réprobation plus ou moins sincères que faut-il retenir de cela ?

Il faut retenir que Paul Hudson, est un anglo-saxon, aux ordres des actionnaires comme nos anciens patrons. La direction de la R&D a été décentrée aux États-Unis depuis longtemps et ça s’accélère. Il essaye de faire pression sur l’Europe pour encore chercher des financements publics. La CGT a dénoncé aussitôt ses propos ! Si le vaccin est trouvé, la CGT revendique la mise en commun pour tous de ce traitement. Pas de profits pour les actionnaires : Notre santé avant tout !
Les réprobations sont justes mais il va falloir batailler sérieux pour que ce vaccin soit entre nos mains et pas aux mains des financiers de tout poil

      7. La CGT chimie appelle au développement des luttes pour les salaires, l’emploi et les conditions de travail qu’en est-il à SANOFI ?

Nous appelons régulièrement les salariés à se rebeller contre ces orientations mortifères pour l’emploi et l’avenir de nos métiers en France. Hélas, la CGT est souvent bien seule pour mobiliser. En R&D, l’évolution de nos Catégories Sociaux Professionnelles est aussi un frein à la mobilisation. De plus en plus de cadres sont présents dans l’entreprise. Plus aucun ouvrier ne travaille en R&D. Très peu de jeunes aussi qui pourraient certainement donner de la dynamique dans nos syndicats.
L’accompagnement des syndicats réformistes comme la CFTC et la CFDT fait moins peur aux salariés qui sont plutôt déjà très résignés du fait de l’accumulation des plans de suppressions d’emploi. Nous n’échappons pas à la généralisation de l’individualisme sur les salaires, des nouvelles techniques de « management », de l’augmentation du télétravail qui brise souvent le lien social, etc etc...
Malgré tous ces inconvénients, nous arrivons quand même à mobiliser les salariés contre le dernier plan de restructuration et aussi contre la réforme des retraites qui a été un moment fort en région parisienne et ailleurs, Sanofi était bien représenté dans les cortèges.

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