Gantry 5

 

N° 821 17/05/2023 Lundi, à Versailles c’est tenu devant 200 patrons étrangers, un nouveau sommet de Choose France(1) où E. Macron est revenu sur sa politique en matière d'attractivité économique avec la volonté affichée d'attirer de nouveaux investissements en France.

Il y a quatre jours à l'Élysée devant les grands patrons de l'industrie, le président de la République avait largement exposé sa politique pour dit-il : "accélérer la réindustrialisation" de la France. Au programme:
• Dégager du foncier industriel à partir des friches existantes(2) , environ 150.000 hectares sont actuellement disponibles, en ouvrant à cette fin un financement d'un milliards d'euros.
• crédit d'impôt industrie verte(3) et bonus écologique(4) .
• Financement de nouvelles installations industrielles pour lesquelles l'État doit engager une enveloppe de 20 milliards d'euros d'ici la fin de l'année sur un total de 54 milliards d'euros sur le plan 2030. Ces financements pourraient représenter 25 % à 40 % de l’investissement.
• Accélération des procédures d'implantation au détriment des études d'impact environnemental préalables avec une pause réglementaire en matière de normes environnementales.
Au total, pour l'année 2023, les investissements étrangers dit de réindustrialisation devraient représenter 13 milliards d'euros contre 10,8 milliards en 2022. De là, cette petite musique que l'on entend depuis quelques temps, vantant le retour de l'attractivité de la France et les succès dans la réindustrialisation du pays. Quelle réalité recouvre ces affirmations?
La première constatation, c'est que l'essentiel des grands projets affichés se situe dans le domaine qualifié de transition écologique ou chemin vers une industrie décarbonée ou verte. De ce point de vue les États s'emparant des conclusions des travaux du GIEC(5) qui, rappelons le a tout à voir avec une organisation inter-étatique et non scientifique(6) , s'en sont saisis pour engager leurs interventions sous formes d'aides massives visant à donner à leurs monopoles des avantages qualitatifs et quantitatifs dans la lutte acharnée qu'ils se mènent à l'échelle internationale pour contrôler les sources de matières premières(9), les marchés, les voies de communications, les territoires et la force de travail. Car ce qui est fondamentalement en jeu c'est bien la réalisation du taux de profit maximum. La concurrence est d'autant plus rude que face à l'impérialisme encore dominant que sont les États-Unis et ses vassaux, des forces montantes autour de la Chine et de la Russie capitalistes qui constituent un pôle impérialiste concurrent, entendent faire valoir leurs intérêts. Ce sont ces réalités qui produisent les chocs brutaux au sein du système impérialiste et qui se traduisent par un niveau de conflictualité aiguë allant de la guerre commerciale à la guerre tout court.
Dans ces conditions, ce qui dans les décennies passées permettait au multinationales de prospérer par l'exportation des capitaux, l'exploitation d'une main-d’œuvre bon marché et la réimportation de marchandises relativement peu chères, par rapport aux productions locales, permettant de limiter les revendications salariales dans leurs propres pays(7) est de moins en moins opérant et une exacerbation de la compétition entre les puissances capitalistes du bloc occidental elles mêmes et toutes les autres se développe brutalement.
Ainsi aux États-Unis, L’IRA (Inflation Reduction Act) avec ses 450 milliards de dollars a jeté la panique en Europe du fait de la fermeture prévisible des débouchés outre Atlantique et de plus les entreprises européennes ont tout intérêt à profiter de la manne de Washington, dans un pays où, qui plus est, l’énergie est 3 à 4 fois moins chères qu’en Europe(8) (Volkswagen par exemple est déjà sur les rangs). Le financement de la réindustrialisation en France se veut une réponse à l'IRA, mais lorsqu'on considère les moyens mis en œuvre aux États-Unis comme en Chine on peut mesurer l'énorme écart qui se creuse au détriment de la France. De plus, toutes ces mesures présentées comme une transition vertueuse et donc verte ne changent rien au modèle capitaliste de développement des transports individuels au dépend de moyens collectifs et souples permettant une mobilité pour tous et moins gourmande en énergie. Si l'on nous vante l'indépendance nationale en matière de voitures électriques on oublie que les besoins en matériaux pour construire les batteries ne sont pratiquement pas produits en France, pas plus d'ailleurs que les puces électroniques qui rentrent massivement maintenant dans la composition d'un véhicule, sans compter que rien n'indique qu'une production massive d'électricité supplémentaire nécessaire pour faire fonctionner le système sera plus vertueux que les actuels moteurs thermiques. Mais pour le capitalisme, le problème n'est pas la rationalité mais le profit et l'accumulation du capital, seules boussoles de son activité.
De ce point de vue, l'État joue un rôle de plus en plus déterminant. Il agit sur le prix de la force de travail en augmentant le taux d'exploitation des salariés en allongeant le temps de travail, c'est la réforme des retraites et en taillant dans les salaires aujourd'hui rongés par l'inflation mais aussi par sa substitution par des primes qui réduisent son caractère socialisé sous forme de la sécurité sociale. Il agit sur l'accumulation du capital en le subventionnant massivement comme c'est le cas avec les mesures dites de réindustrialisation. De ce fait l'État joue un rôle majeur dans la restructuration du capitalisme dans le contexte de sa mondialisation qui se poursuit et où l'État met ses propres territoires et leur force de travail, de formation et de recherche en concurrence avec tous les autres dans le monde. On comprend que dans ces conditions, les mesures prises qui liquident les conquêtes sociales suscitent de plus en plus de résistances de la part des travailleurs salariés, la lutte contre la réforme des retraites en est la dernière illustration, on comprend aussi que face à ce mécontentement qui enfle, la question du contrôle social soit un élément majeur de la stratégie de l'État capitaliste dans sa remise en cause des libertés publiques.
Tout cela nous fait mesurer que la nature de l'enjeu pour l'avenir de l'humanité c'est bien la question de la perpétuation ou non du système d'exploitation de l'homme par l'homme, essence du capitalisme, tout autre voie qui, comme hier, voudrait le réformer ne mènerait qu'à des impasses. Le capitalisme est mauvais pour les peuples, un frein pour le développement de l’humanité et tout indique qu'il faut y mettre fin. C'est là la raison d'être d'un parti révolutionnaire dans son temps!

Imprimer cet article

1 Selon le site officiel de l'Élysée, Choose France a été :" Instauré par le Président Emmanuel Macron, il vise à présenter et expliquer aux grandes entreprises internationales les réformes menées pour favoriser l’activité économique de notre territoire. Il permet également de souligner l’importance des investissements internationaux pour soutenir la croissance, l’innovation et l’emploi partout en France."
2 La banque des territoires (une des directions de la Caisse des dépôts) va investir un milliard d'euros afin de "dépolluer" des friches et les mettre à disposition pour de futurs projets.
3 Il s'agit de financer les nouvelles installations produisant des énergies renouvelables comme l'éolien et le solaire
4 Le bonus écologique à l'achat d'une voiture électrique sera lui réformé pour prendre en compte l'empreinte carbone de leur production et favoriser les véhicules fabriqués en Europe. En ligne de mire, la Chine, dont l'énergie qui permet de les produire repose encore largement sur le charbon. Ce qui n'empêche pas Renault de commercialiser sa Dacia électrique fabriquée en Chine.
5 GIEC groupement international d'étude du climat
6https://www.cuem.info/?page_id=1135
7 John Smith, l'impérialisme au XXIe siècle, Éditions Critiques, 2019
8https://www.sitecommunistes.org/index.php/france/economie/2276-la-desindustrialisation-la-principale-industrie-de-l-union-europeenne
9 La société d’investissement Infravia lance, en partenariat avec l’Etat, un fonds d’investissement dédié aux minerais et aux métaux critiques. L’Etat va injecter 500 millions d’euros. Infravia et deux milliards d’euros à terme pour sécuriser les approvisionnements de minerais et métaux critiques au bénéfice de l’industries française et européenne, les besoins en minerais et matériaux comme le cobalt, le nickel ou le lithium vont considérablement s’accroître.

 

Notre brochure
brochure
 
Bulletin d'adhésion
bulletin d'adhésion
 
Affiche
affiche