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N° 819 25/04/2023  La Chine et la guerre en Ukraine: à propos du plan de paix chinois. Victoire historique des Indépendantistes aux élections territoriales en Polynésie. Des syndiqués CGT présents lors de la manifestation du premier mai du PAME, le syndicat de classe grec.

 La Chine et la guerre en Ukraine: à propos du plan de paix chinois

Le 26 avril, un échange de plus d'une heure entre les Présidents chinois Xi Jinping et ukrainien Zelinsky, à l'initiative du Président ukrainien, a été qualifié par ce dernier de : "long et significatif", et s'est traduit par la nomination d'un ambassadeur d'Ukraine en Chine, tandis que la Chine a décidé de l'envoi d'une délégation en Ukraine pour approfondir ce qu’elle nomme :" la crise ukrainienne" et non la guerre en Ukraine. Moscou a "pris acte" de cette initiative visant :" à s'efforcer de mettre en place un processus de négociation", tandis que les États-Unis ont qualifié cette initiative de "bonne chose". Cette relation Chine-Ukraine se place dans le contexte du plan en 12 points présenté par Pékin et baptisé :"Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne ."
Partant de l'analyse que nous avons faite de la guerre impérialiste en Ukraine , il convient d'éclairer la nature des plans et initiatives de paix formulées. En réalité, l'invasion russe de l'Ukraine, en février 2022, n'était que la déclaration officielle d’une guerre qui a commencé il y a des années, entre les États-Unis, l’OTAN et l’UE d’une part, qui utilisent l'Ukraine comme leur base d'intervention et la Russie capitaliste d’autre part, qui est un allié de la Chine dans le cadre du grand conflit entre la Chine et les États-Unis pour la suprématie dans le système impérialiste .
Pendant que cette guerre fauche par milliers des jeunes russes et ukrainiens envoyés à l’abattoir, les capitalistes des deux camps avec leurs gouvernements maintiennent, bien que dans une mesure limitée par rapport à la situation d'avant février 2022, une coopération stable, y compris sur le plan commercial.
Ainsi, par exemple, la Russie continue de vendre aux États-Unis et à la France de l'uranium pour leurs installations nucléaires. En effet, elle couvre 20% des besoins des 92 réacteurs nucléaires américains , tandis que la France a reçu en 2022 153 tonnes d'uranium russe, couvrant 15% de ses besoins . La France se dit prête à participer à la construction en Hongrie d'une centrale nucléaire en collaboration avec Rosatom . La société russe Gazprom a annoncé qu'elle avait envoyé 42,4 millions de mètres cubes de gaz à l'UE via les gazoducs de l'Ukraine qui est en guerre. En même temps, dans le port russe de Novorossiysk, sur la mer Noire, les pétroliers de l'entreprise américaine Chevron continuent de charger le pétrole qu'elle extrait au Kazakhstan et qui y arrive par un oléoduc de 1.500 km traversant les territoires du Kazakhstan et de la Russie. C'est par cet oléoduc que les deux tiers du pétrole extrait au Kazakhstan sont acheminés vers le marché mondial.
En outre, les matières premières et des marchandises russes continuent d'être acheminées par l'intermédiaire de pays tiers vers ce que l'on appelle l'Occident. D'autre part, les produits fabriqués en Occident continuent à être vendu à la Russie par l'intermédiaire de ce que l'on appelle le Sud global, qui est désormais le nom donné aux pays qui ne respectent pas l'embargo anti-russe, notamment la Chine, l'Inde, la Turquie et d'autres pays. Ainsi, dans le monde, les entreprises énergétiques et d'armement en particulier voient leurs profits augmenter tandis que les oligarques russes ne se sont jamais autant enrichis . Ainsi, des deux côtés du front de cette guerre impérialiste les capitalistes s'enrichissent et veillent à leurs intérêts!
C’est dans ce contexte qu'il faut juger des initiatives et des plans de paix visant à formaliser les intérêts de chacun des pôles impérialistes actuellement en conflit ouvert. Le plan chinois, n'est pas le premier plan de paix. En 2014 et 2015 furent signés les accords de Minsk 1 et Minsk 2 dont on sait maintenant qu'aucune des parties signataires concernées n'entendait les respecter. En fait les forces dirigeantes en Ukraine avec le soutien des États-Unis, de l'OTAN et de l'UE avait besoin de temps pour se mettre en ordre de marche de conserve et sous le contrôle de l'impérialisme états-uniens et de l'Union Européenne pour préparer leur adhésion aux structures militaires et économiques l'arrimant au bloc impérialiste dirigé par les États-Unis. De leurs côtés les forces du capitalisme et de l'État russe avaient aussi besoin de temps pour reprendre le contrôle politique des régions du Donbass qui s'étaient révoltées contre le pouvoir fascisant ukrainien dont les dirigeants se réclamaient du communisme. Quand les différentes parties du conflit ont considéré que les objectifs qu'elles s'étaient fixés avaient été atteints et que le rapport de forces était désormais en leur faveur, les accords de Minsk ont été formellement abolis. L’ambiguïté du contenu des accords de Minsk quant au futur du Donbass ont permis aux protagonistes du conflit de s'en défaire facilement.
Le plan de paix chinois présente les mêmes ambiguïtés que les accords de Minsk. S'il fait une référence au :" respect de la souveraineté nationale de tous les pays", et de "l'indépendance et de l'intégrité territoriale de tous les États", il se garde bien de préciser quelle est la nature des territoires ukrainiens annexés par la Fédération de Russie . En fait, sous couvert d'une proposition de paix, la Chine entend dans le contexte d’une poursuite du conflit marquer une relative neutralité sans être écartée d'un règlement fut-il provisoire sur lequel elle compte peser comme un pôle impérialiste montant face aux États-Unis. Elle ne peut donc ni laisser tomber la Russie, ni apparaître comme étrangère au conflit et donc à sa résolution et se placer dans le dispositif de partage des forces au sein d'une Europe recomposée. De plus La proposition chinoise, qui met l'accent sur la reconstruction après la guerre, est en fait l'expression des intérêts de la Chine dans la compétition de tous les monopoles de la construction et des banques de reconstruction qui espèrent obtenir une part du gâteau de la reconstruction des infrastructures et des logements endommagés par la guerre, qui sera à nouveau payée par le peuple.
« Quand ceux d’en haut parlent de paix, le petit peuple sait que c’est la guerre. Quand ceux d’en haut maudissent la guerre, les feuilles de route sont déjà remplies », écrivait B. Brecht.

https://www.fmprc.gov.cn/fra/zxxx/202302/t20230224_11030718.html
2 https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/europe/1784-ukraine-la-logique-d-escalade-militaire-en-cours-c-est-celle-des-affrontements-au-sein-de-l-imperialisme
https://www.sitecommunistes.org/index.php/publications/documents/1934-un-document-pour-mieux-comprendre-les-raisons-et-les-consequences-de-la-guerre-en-ukraine
3 https://www.sitecommunistes.org/index.php/monde/monde/2244-visite-de-xi-a-moscou-des-liens-economiques-renforces-dans-un-monde-multipolaire-capitaliste
4 "Les exportations de combustible et de technologies nucléaires en provenance de Russie ont augmenté de plus de 20% l'année dernière"https://forbes.ua/ru
5"La France a acheté 153 tonnes d'uranium enrichi à la Russie pour ses centrales nucléaires en 2022", https://tass.ru
6 https://www.lemonde.fr/international/article/2023/04/27/hongrie-la-france-prete-a-participer-au-projet-de-centrale-nucleaire-du-russe-rosatom_6171229_3210.html
7 https://www.latribune.fr/economie/international/les-oligarques-russes-ont-accru-leur-fortune-grace-la-guerre-959833.html
8La Constitution de la Fédération de Russie avec les changements de 2022, site de la Douma d'État, http://duma.gov.ru

Victoire historique des Indépendantistes aux élections territoriales en Polynésie

Pour la première fois depuis que la collectivité territoriale existe, les indépendantistes polynésiens du parti Tavini Huiraatira obtiennent la majorité absolue à l’Assemblée territoriale.

Oscar Temaru, le dirigeant historique du parti, avait déjà animé le gouvernement territorial à plusieurs reprises depuis 2004, mais dans le cadre de coalitions parfois improbables, comme avec le parti de l’ancien dirigeant historique de la Polynésie, à la botte de l’État français, Tahoeraa Huiraatira, qui fut affilié au RPR puis à l’UMP a changé de nom aujourd’hui. Jamais, il n’y avait eu de gouvernement purement indépendantiste, et jamais les gouvernements dirigés par Temaru n’avait tenu le temps d’un mandat de l’assemblée.

Tavini Huiratiira a recueilli 34,89 % des voix au premier tour et 44,3 % au second tour et a donc battu largement le parti au pouvoir depuis 2013, Tapura Huraatira du président sortant Edouard Fritch, autonomiste et proche de l’UDI, et, surtout, devenu le soutien inconditionnel de Macron dans le territoire, qui a recueilli 30,46 % au premier tour et 38,5 % au second. La troisième liste présente au second tour, celle du parti A Here Porinetia, centriste autonomiste, créé par des dissidents de Tapura Huiraatira en 2020, a obtenu 14,53 % au premier tour et 17,1 % au second.

Le mode de scrutin accorde une majorité absolue à la liste arrivée en tête depuis la réforme électorale appliquée à partir de 2013, sur le modèle des élections municipales et régionales de métropole. C’est ce qui explique qu’avec 44 %, le parti indépendantiste a obtenu 38 des 57 sièges contre 15 à Tapura Huiraatira, 3 à A Here Porinetia et 1 à l’ancien parti de Gaston Flosse rebaptisé Amuitahiraa en 2022 qui a obtenu 11,88 % au premier tour et pu fusionner au second avec A Here Porinetia.

Le score des indépendantistes au premier tour est leur plus élevé depuis que l’élection existe. Ils ont bénéficié au second tour du report de voix de beaucoup des partis éliminés, qui ont tous fait campagne contre Edouard Fritch. Dans cette période de forte hausse des prix et de lutte contre la réforme des retraites, les mesures prises par Fritch, comme celle, emblématique, d’instaurer une nouvelle TVA en 2022, de même que son soutien à Macron ont suscité la colère des habitants.

Il lui a également été reproché ce que tous les journaux (du Monde à Libération en passant par Le Parisien) appellent pudiquement « la mauvaise communication de son gouvernement pendant l’épidémie de COVID ». En réalité, comme dans les DOM, ce sont les mesures autoritaires, en particulier le pass sanitaire et la suspension des soignants non vaccinés qui ont déclenché la colère des salariés, notamment des salariés hospitaliers. Le parti indépendantiste s’est prononcé depuis le début pour leur réintégration.

L’amplification de la victoire du parti d’Oscar Temaru s’est donc faite sur la base d’un mécontentement généralisé envers l’ancien pouvoir et représente un camouflet pour Emmanuel Macron.

Le parti Tavini Huiraatira est en progression nette, et ce n’est pas vraiment nouveau, puisqu’il a obtenu en juin 2022 les trois sièges de députés de la Polynésie. Ses représentants siègent dans le groupe GDR, organisé autour du PCF. Au-delà du rejet d’Edouard Fritch, l’idée indépendantiste progresse sensiblement.

Le nouveau gouvernement que devrait diriger Moetai Brotherson, un des trois députés (Oscar Temaru a 78 ans), sera donc en position de force pour négocier avec l’État français un processus de décolonisation et un referendum d’auto-détermination, et ce, d’autant plus que l’ONU a placé la Polynésie française sur la liste des pays à décoloniser.

Pour autant, l’indépendance n’est pas pour demain. Moetai Brotherson représente l’aile modérée du parti, qui a permis de fédérer au-delà de l’électorat traditionnel et populaire de son parti. Durant toute la campagne, il a choisi d’axer son discours sur le pouvoir d’achat et de tempérer la ligne dure prêtée aux indépendantistes, allant jusqu’à écarter une indépendance rapide de la collectivité : « Je pense qu’on ne peut pas envisager un référendum avant dix ou quinze ans, mais tout va dépendre des discussions avec l’Etat »avait-il déclaré.

Reste que la base militante et électorale populaire de Tavini Huiraatira ne se laissera pas voler sa victoire, nous verrons donc comment évoluerons les choses et ce que les dirigeants du parti feront du mandat de cinq ans qu’ils ont obtenu.

Le Parti Révolutionnaire Communistes est favorable à l’indépendance, de la Polynésie comme de tous les autres territoires encore colonisés par l’État français. Mais l’histoire de la décolonisation nous enseigne que l’indépendance ne suffit pas, il faut aussi construire un État socialiste. Force est de constater que les scenarii d’alliance de la classe ouvrière avec la Bourgeoisie nationale (opposée à la Bourgeoisie compradore), ayant également intérêt à l’indépendance, n’ont nulle part, au final, donné ce résultat, ni en Égypte, ni en Irak, ni en Syrie, ni même en Algérie.

L’indépendance doit aller de pair avec le socialisme, et c’est la classe ouvrière qui doit diriger ce combat.

Des syndiqués CGT présents lors de la manifestation du premier mai du PAME, le syndicat de classe grec

Une délégation de syndicalistes CGT, comprenant notamment Olivier Mateu, secrétaire général de l'UD CGT 13 et Mathieu Bolle-Redat, secrétaire du syndicat CGT des cheminots de Versailles, s'est rendue en Grèce pour participer, entre autres, à un grand rassemblement de soutien à la lutte des travailleurs en France organisé par le syndicat de classe grec PAME ainsi qu'au 1er Mai à Athènes. Ce fut une manifestation du 1er Mai massive et combative à Athènes avec nos camarades grecs du puissant syndicat de classe PAME dont la solidarité concrète et sans faille, avec notamment la venue en France de plusieurs délégations de dirigeants et militants ouvriers du PAME, envers nos luttes, a été remarquée et largement appréciée dans notre pays. Olivier Mateu a pris la parole et a rappelé que : « Nous n’avons qu’un moyen, celui de la lutte des classes, basée sur l’unité des travailleurs du monde entier. »

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