717-19/05/2021 La droite chilienne sort vaincue du scrutin des 15 et 16 mai. Les citoyens chiliens ont élu une assemblée, chargée d’écrire une nouvelle constitution.

Celle en vigueur date de 1980, elle émane de la dictature militaire de Pinochet. Elle se fonde sur un modèle ultra libéral, celui de l’école dite de Chicago dans lequel le pinochisme a trouvé sa boite à outil, avec la privatisation la plus large des biens publics y compris l’éducation, la santé, les retraites, jusqu’à l’eau elle-même. La prochaine, en 2022, sera écrite par les « Constituants » élus ce week-end.
Cette victoire est le fruit des luttes conséquentes menées par le peuple chilien. En octobre et novembre 2019, les grèves, dont deux grèves générales ont bloqué le pays, des millions de manifestants ont envahi toutes les grandes villes réclamant des réformes sociales et la démission du Président Piñera. L’état d’urgence est décrété, l’armée déployée mais les mouvements persistent, les mineurs du cuivre d’Escondida entrent en grève générale. La répression fait 26 morts et des milliers de blessés. Un accord est finalement conclu le 15 novembre, Piñera refuse de démissionner mais doit accepter le principe de réunir une assemblée constituante intégralement élue. Cette assemblée totalement paritaire (hommes-femmes) sera formée de 155 élus dont 17, représentant les 10 peuples autochtones et fonctionnera à la proportionnelle intégrale.
Ce scrutin semble enfin tourner la page de l’ère Pinochet, président de 1973 à 1989 dont les successeurs démocrates-chrétiens seul comme Patricio Alywin ou issu(e)s de la coalition dite Concertation qui compte aussi des membres du Parti socialiste comme Michelle Bachelet, élue présidente à deux reprises, des membres du Parti radical social-démocrate etc. Quant à Piñera, président actuel hommes d’affaires milliardaire, membre de Rénovation sociale, il a appelé à son gouvernement d’anciens éléments du gouvernement Pinochet. Sous ces président(e)s, totalement dévoués au capital, les inégalités ont continué à s’aggraver considérablement, sous l’œil malveillant du voisin états-unien qui a des intérêts dans les mines de cuivre et de lithium chiliennes. L’épidémie de Covid, particulièrement massive a jeté une lumière crue sur ces inégalités : système de santé public quasi à l’abandon pour le peuple, des cliniques privées luxueuses pour les riches. C’est l’état le plus inégal d’Amérique latine, ses richesses naturelles sont pillées par les multinationales depuis des décennies.
La gauche chilienne et tout particulièrement le Parti Communiste, totalement décimée par la dictature Pinochet et les répressions suivantes, est aujourd’hui représentée par Frente Amplia (Le front large) constitué de très nombreux mouvements et partis qui souhaitent présenter une alternative au bipartisme de la Droite et des sociaux-démocrates. Le Parti Communiste Chilien, le plus grand parti politique avec 46 000 adhérents est mené par Daniel Jadue, il cherche à trouver sa place entre ces coalitions et une vraie ligne de mise en cause du système.
Daniel Jadue, le candidat du Parti communiste à la présidentielle en tête des sondages s'est réjoui : « les secteurs qui cherchent à transformer le pays ont triomphé ». Et c’est bien de cela qu’il s’agit après ce scrutin. Avec une faible participation : 42,5 % de votants seulement, c’est vraiment le petit score de la droite et son extrême qui marque ce vote : 21 % alors qu’elle partait conquérante et sûre d’elle.
Surtout, les indépendants font une percée surprise. « La liste du peuple » et les « Indépendants non-neutres », gauche historique 31 % du total de l’Assemblée constituante. Ces indépendants sont pour la plupart directement issus du mouvement de contestation, mais leur grande diversité et l’absence d’organisation peut réduire leur impact.
Le rejet de la droite entrouvre une perspective pour ce peuple si longtemps étouffé mais il ne suffira pas de « dépinochetiser » la Constitution comme y appelle la sociologue E. Barozet. L’avenir du peuple chilien est encore dans la rue avec ses organisations de classe et il a tout notre soutien pour abattre le capitalisme.

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