734-16/09/2021 Après le Tchad en avril, le Mali en mai, c’est au tour de la Guinée, ancienne colonie française aussi, de connaître un coup d’état militaire.

Le 5 septembre 2021, la junte, menée par le colonel Mamady Doumbaya, parvenue au pouvoir a capturé le président en exercice Alpha Condé à la popularité en berne, suspendu la Constitution, dissout le gouvernement, instauré le couvre-feu et fermé les frontières aériennes et terrestres.
Alpha Condé, élu président la première fois en 2010, réélu en 2015, avait fait modifier la Constitution en mars 2020 pour pouvoir se représenter à l’élection présidentielle d’octobre 2020, élection dont il s’est déclaré vainqueur. Ce coup de force n’a pas vraiment provoqué l’indignation générale de l’opinion moniale même si, en Guinée, les manifestations populaires de protestation ont fait une trentaine de morts et plusieurs dizaines de blessés. Dans la même période Benny Steinmetz magnat franco-israélien des matières premières comparaissait devant un tribunal suisse. Au cœur de l’affaire, des pots de vin versés pour obtenir des droits miniers sur l’un des plus grands gisements de fer du monde situé en Guinée. Ce pays possède des ressources minières importantes : bauxite 1/3 des réserves mondiale de cette matière première de l’aluminium, fer, or, diamant, pétrole, uranium, phosphate et manganèse. Le fer et le pétrole demeurent sous-exploités. C’est dire si ce pays suscite les convoitises de multinationales. Sékou Touré, acteur et premier président marxiste de l’Indépendance (de 1958 à 1984) est parvenu avec son parti, le Parti Démocratique de Guinée, à arracher une indépendance totale et à refuser la Communauté française, la France de de Gaulle lui a mené une guerre économique totale. Dès 1960, il se rend en Chine populaire et obtient des aides financières conséquentes investies dans les mines. Ses successeurs laissent la porte ouverte aux capitalistes nord-américains, en particulier canadiens puis aux russes.
Ce coup d’état du 5 septembre a ceci de particulier qu’il ne provoque que des réactions tout à fait mesurées tant en Afrique que dans les organisations internationales. Le chef de la junte, Doumbaya, n’est autre qu’un ancien de la légion étrangère, ex-auditeur de l’Ecole de guerre de Paris en 2017, qui s’est empressé de libérer les prisonniers politiques en promettant un gouvernement d’union nationale et une « transition inclusive et apaisée ». Il s’est surtout empressé de rassurer les investisseurs, de respecter tous les contrats économiques et miniers « sans chasse aux sorcières ». L’ex-président Condé est en bonne santé dans une aile du palais. On comprend pourquoi, tant l’ONU que l’Union Africaine, la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, l’UE et les autres organisations regardent avec tant de tiédeur voire de bienveillance ce pouvoir. Pouvoir qui n’a nullement l’intention de sortir le peuple de la misère : la Guinée malgré toutes ses richesses pointe au 139è rang mondial en termes de PIB, au 178è sur 189 pour l’indice de développement humain où 55% de la population vit sous le seuil de pauvreté et 80 % de la population active travaille dans le « secteur informel ». L’absence quasi totale d’organisations de classe syndicale et politique orchestrée par le capital sous la houlette de l’ancienne puissance coloniale ne permet pas, actuellement, au peuple guinéen de prendre en mains sa destinée ni celle du pays. Ce n’est qu’en reprenant les richesses volées depuis le début de la colonisation et leur gestion que les travailleurs de Guinée sortiront de cette misère dans un pays qui a tous les atouts du développement en mains.

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