Les services publics (et les usagers) souffrent des privatisations et du désengagement de l’État pour assurer leurs missions premières : répondre aux besoins multiples, transport, communication, santé, éducation, recherche, électricité, gaz, eau, environnement, route, justice, police, culture, ....

Les services publics ont été le pivot de la reconstruction de la France, ruinée par la guerre et la collaboration, ils ont été le pivot « d’un ordre social plus juste » comme l’arrêtait le Conseil National de la Résistance.

En fait, les services publics sont constitutifs de la nation française et de son indépendance.
Les privatisations ont eu toutes le même objet : développer le profit capitaliste en transférant les activités publiques vers le privé et répondre aux directives européennes, de concurrence libre et non faussée.
Les services publics ou entreprises nationalisées, dotés de droits spéciaux ou exclusifs (Monopoles) sont autant d’obstacles à la circulation des biens et services, incompatibles avec les conceptions du capital national et européen. Les PTT d’alors ont subi de plein fouet cette privatisation par étapes successives pour aboutir au résultat que l’on connaît aujourd’hui.

La loi du 2 juillet 1990 n°90-568, créée à compter du 1er janvier 1991, deux exploitants autonomes de droit public : La Poste et France Télécom .
Leurs missions étaient définies dans le cadre réglementaire du secteur postal, le livre vert, en lien avec le processus d'élaboration européen (1992 - 2008). Cette loi de 1990, annonçait les déréglementations et ouvrait à la concurrence en distinguant 3 marchés postaux : le service universel réservé, le service universel non réservé, les services non réservés.
C’est ainsi qu’à partir de 1990 jusqu’à 2011, tout une série de directives mettaient à mal le service public de La Poste, allant de restructurations internes (abandons, transferts et concentrations d’activités, suppressions de services, suppressions de postes, de centres de tri..), segmentation d’activités sur des critères sociaux (l’usager n’existe plus, c’est un client). D’ailleurs à cette époque un rapport issu de la commission européenne faisait état de la disparition de 100 000 emplois et estimait entre 200 000 et 400 000 le nombre d’emplois menacés dans les 10 ans à venir.
Ou en est-on, aujourd’hui ?
L’offensive du capital en matière de services publics dépasse le territoire national, elle est européenne (décision du sommet de Barcelone).
Au 1 janvier 2010 La Poste a changé de statut juridique et devient Société Anonyme à capitaux publics (SA La Poste). Dans la foulée, le 1er Janvier 2011, et après le transport aérien en 1997, les télécoms un an plus tard, le fret ferroviaire en mars 2006, l'électricité et le gaz en 2007, ou encore le transport ferroviaire de passagers à l'international fin 2009, les services postaux français ont dû s’ouvrir à la concurrence, y compris concernant les plis de moins de 50g.
Il s'agissait de la dernière étape de la « libéralisation » du courrier planifiée par des directives européennes entre 1997 et 2002 afin de « faire baisser les prix et d'améliorer les prestations aux consommateurs. »

Dans la même période le statut du personnel a été l’objet de toutes les atteintes, l’emploi statutaire a été massivement relégué au fil des années, les concours n’existent plus, faisant entrer le statut de droit privé avec des personnels contractuels dans tous les métiers.
Le groupe LA POSTE (251000 salariés) s’est structuré autour d’une maison mère (La Poste 202 000 salariés) et de cinq Directions pour répondre à ses missions : Branche Courrier-Colis (126 000 agents), Direction des Services Financiers (regroupement des chèques postaux 13486 agents), La Direction Support (Siège) et Structures (Services à la personne) 6588 salariés, Direction Réseau Bureaux de Poste (55673 salariés), Direction numérique (280 salariés) axée sur la santé pour les cliniques privées, et composé de 17 filiales du Groupe LA POSTE dont la Banque Postale (5000 salariés), certaines sont plus importantes que d’autres comme Médiapost (12000 salariés) et Chronopost ( 3800).

En 10 ans de privatisation de La Poste (maison mère), plus de 100 000 emplois ont été supprimés, ce qui a déstructuré, dégradé la qualité du service comme pour tous les services publics. Les fonctionnaires aujourd’hui ne représentent plus que 45 % des effectifs.
Dans le même temps Le Groupe La Poste a perçu de l’état près de 1 Milliard d'euros en 3 ans (2016/2019) au titre du Crédit impôt compétitivité emploi (CICE).
Alors que l’épidémie du virus est déjà sur le devant de la scène, le 4 mars 2020, le gouvernement dans le cadre de sa loi PACTE supprime l’obligation de sa détention majoritaire dans le groupe La Poste, l’état passant ainsi de 73,68 % à 34% du capital, en toute discrétion.
Le groupe La Poste fusionne avec la Caisse Nationale de Prévoyance (CNP) (3e assureur-vie européen en 2014 et le 6e assureur au Brésil), via sa filiale de la Banque postale. Celle-ci devient le premier groupe bancassurance européen. Cela se traduit par une évolution de son actionnariat – qui aboutit à une prise de pouvoir de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) –, et à une modification de la gouvernance de la Poste.
Les PTT à leur origine n’étaient pas une banque, ils n’assuraient pas la gestion financière des produits financiers, ils se contentaient de les mettre à disposition du public. Quand on dépose de l’argent sur un CCP (Compte Chèque Postal), c’est le Trésor public qui le gère, quand on en dépose à la Caisse nationale d’Epargne, par exemple sur un livret A ou sur un plan d’épargne logement, c’est la caisse des dépôts et consignations (CDC).
Ce désengagement de l’Etat du 4 mars 2020 c’est la liquidation de la Direction Services Financiers de La Poste (ex CCP), vers sa filiale La Banque Postale, avec des milliards qui vont tomber dans l’escarcelle des banquiers.
De grandes inquiétudes pèsent sur La direction Branche Réseau.
Les missions d’aménagement du territoire sont abandonnées par la transformation du réseau des bureaux de poste en « Maison de Service Au Public », les partis politiques font silence, et pour cause, ils y ont tous participé.
L’Etat et l’association des maires de France déclarent ensemble : « ce n’est pas à La Poste de supporter l’aménagement du territoire ». Pour ce faire, il a été créé alors le « fonds de péréquation » abondé de 174 millions d’euros par an, soit 522 millions d’euros (période 2017/2019), contre 510 millions période (2014/2017). Ceci non pas pour moderniser et développer les bureaux de poste existants, mais pour fermer des milliers de bureaux de postes, les transférer sur les collectivités (mairies) ou à des commerces. C’est le dépeçage en règle du service public postal de proximité qui fait tant défaut aujourd’hui.

D’ailleurs la pandémie a mis en avant ce qu’il allait advenir de La Direction Branche Réseau de La Poste qui a fermé 70% des bureaux sur le territoire, malgré la lutte des postiers sur tout le territoire national qui a permis de maintenir et de freiner les fermetures de bureaux.
On est loin de l’ouverture des 7700 bureaux de Poste, sur les 17000 qui existaient en 1991. Les missions du groupe La Poste deviennent ni plus ni moins qu’une délégation de services publics au privé.
Cette réalité liée à la pandémie sert, pour expérimenter grandeur nature, la liquidation du réseau de bureaux de poste et des salariés formés, déjà programmé pour 2023, ou seuls resteraient 3400 bureaux de postes (nationaux). En effet, depuis le 16 mars, la Direction de la Poste a décidé unilatéralement de ne laisser que 1600 bureaux sur le territoire national ouverts...mais surtout de continuer toutes les activités, et en particulier les plus rentables, voire à en développer de nouvelles, notamment les services à la personne qui ne font pas recettes (6000 contrats en 2019), c'est-à-dire peau de balle dans le budget.

Avec ce désengagement de l’état, l'activité historique du courrier, n'est aujourd'hui plus au centre des perspectives de développement du groupe La Poste. La pandémie a aussi prouvé que le service public du transport et de la distribution de la presse de La Direction Branche Courrier-Colis n’était pas en capacité de répondre à ses missions.
En ce qui concerne la distribution de la presse la France est le seul pays où la liberté de distribution de la presse est inscrite dans la loi. Les magnas de la presse n’ont rien dit quand le gouvernement a remis en cause fin décembre 2019, la loi du 2 avril 1947, dite "loi Bichet" (du nom de son rapporteur), qui permet à chaque éditeur, quelle que soit sa taille et son influence, d'avoir l'assurance d'être distribué (sauf dans les cas d'interdiction édictées par le ministère de l'intérieur). Malgré la loi de 1990, l’État avait maintenu à La Poste une mission essentielle au pluralisme démocratique et à la diffusion des idées dans notre pays (Articles L.4 et R.1-1-17 du Code des postes et des communications électroniques).
Le 17 décembre 2019, le gouvernement a transgressé la loi du 2 avril 1947en adoptant une décision (n° 2019-1868) qui légalise le transfert de la distribution de la presse au secteur privé à partir de 2023. La Poste n’aura plus cette mission de diffusion 6 jours sur 7.
La distribution de la presse, c’est chaque jour 6 millions de journaux vers 26 millions de foyers et d’entreprises, soit 1,8 milliard d’exemplaires distribués par an. Pourtant si ces chiffres paraissent importants, ils ne représentent que 25 % du volume distribué par La Poste. Pour ce faire et répondre à ses missions de service public, le groupe La Poste perçoit une aide de l’état issue de la loi du 2 avril 1947 au transport postal de la presse, ce qui compte pour un tiers dans les revenus liés à la distribution de la presse par circuit postal globalement.
La compensation versée à La Poste au titre de l’aide postale, ne cesse de baisser, elle est passée de 329 M€ en 2008 à 103,8, M€ en 2019. On voit là comment le gouvernement entend privatiser la distribution de la presse, laissant à La Poste que les opérations jugées « non rentables », à savoir les usagers éloignés des bourgs ou centres villes, qui « coûtent cher ». Ainsi l’Etat a tué le service public de la distribution, aux motifs de donner davantage de libertés aux kiosquiers, avec l’ouverture du capital des distributeurs à des fonds privés. C’est la mort du système solidaire mis en place à la libération pour accompagner le développement d’une presse libérée.
C’est dans ce but que la décision du 17 décembre 2019 a été prise, car l’épidémie est l’occasion rêvée pour La Poste d’accélérer la stratégie du groupe Branche Courrier-Colis, notamment avec une distribution 3 jours sur 4. Mais à quel prix ? Pour quel service public ?

De quel service public postal parle- t- on ?

On voit le résultat que produisent les politiques de liquidation du service public Postal menées depuis 40 ans par les gouvernements de Droite, PS et « d’Union de la Gauche ». Depuis des décennies, les ministres des PTT, puis les ministres de l’Industrie ont mis en place des mesures de suppressions massives d’emplois qui ont été poursuivies par tous les gouvernements qui se sont succédé. Macron veut achever et vite, la liquidation du service public de la Poste.
Cette stratégie d’approche capitaliste a des conséquences sur les conditions de travail, l’emploi, les salaires, les activités…dans toutes les entreprises du Groupe La Poste, mais aussi pour les usagers avec un désengagement et une marchandisation à outrance du service public postal.
La Poste modèle mondial de service public a été transformé en caricature de distribution digne du tiers monde avec la pandémie. La presse, comme le courrier des usagers ont été distribué ou en cours de distribution avec beaucoup de retard, avec du personnel en CDD recruté chez Médiapost (filiale) qui était en chômage partiel, des emplois précaires payés au rabais 21h par semaine pour « terminer » leurs tournées, sans pouvoir se nourrir convenablement, dans l’indifférence patronale la plus totale.
Depuis des années les postiers et postières travaillent dans des conditions déplorables, subissent des réorganisations permanentes. La santé des agents en période d’épidémie, malgré la communication lénifiante, n’est pas la priorité du groupe, si ce n’est les quelques aménagements obtenus grâce à l’intervention des organisations syndicales et plus particulièrement la CGT.
Les lois d’urgences d’aujourd’hui portent atteinte à l’état de droit et permettent de nouvelles restrictions, déréglementations répondant toujours davantage au capital. La dégradation de l’état de santé des personnels dans le groupe La Poste, existe notamment depuis 2010 ou les restructurations se sont enchaînées tous les 18 mois, entrainant de massives suppressions d’emplois, transformation des métiers ce qui a engendré de nombreux suicides.
Les lois d’urgence permettent au groupe La Poste d’aller encore plus loin, et ce qu’il entend mettre en place dès le 11 mai, c’est un véritable tsunami. En effet, il entend supprimer d’une part toute la distribution le samedi, faire distribuer la presse par des salariés autres que les facteurs et il veut faire signer un accord au rabais pour les salariés de droits privés en activité partielles lié au Covid-19. C’est véritable un recul social !

Communistes, condamne la politique de liquidation du service public engagée par La Poste et le gouvernement au mépris des besoins des personnels et des usagers. Il met en avant la nationalisation des moyens de productions et d’échange, pour éliminer des mains du capital tout ce qui est source de profit.

Le jour d’après, n’est pas de poursuivre la privatisation, mais au contraire répondre aux immenses besoins des citoyens. Le service public postal doit être nationalisé, géré par les travailleurs. Il faut pour cela engager la lutte, abroger d’une part les lois inhérentes aux lois postales du 17 décembre 2019 et du 4 mars 2020 , mais aussi celles des Ordonnances n° 2020-460 du 22 avril 2020 « portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid-19 » sur lesquelles La Poste SA s’appuie, et qui au final, feront que ce sont les salariés, qui paieront la crise sanitaire actuelle .
Les services publics, La Poste et Orange aux mains du capital ne font qu’accentuer l’exploitation les salariés.

Une autre logique de service public s’impose.
Cela passe par le retour à la nation de l’ensemble des services qui ont été privatisés, le retour à un statut de fonctionnaire, avec des emplois de fonctionnaires, bien rémunérés, la réintégration de toutes les filiales dans la maison mère sans indemnisation des actionnaires spoliateurs des richesses nationales, une gestion publique du service assurée par les travailleurs excluant toutes notions de profit.

Cela ne se fera pas sans lutte, sans la détermination des salariés et des usagers pour reconquérir un service public postal au service exclusif du peuple. Il est temps de s’engager sans tarder dans cette voie.

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