N° 783 23/06/2022 EHôtels Adagio (sous-traitant Primium) à Marseille: Les femmes de chambre et gouvernantes des hôtels Adagio du Vieux-Port et de Saint-Charles ont cessé le travail le 16 août au matin et installé des piquets de grève.

Leurs revendications : “Surcharge de travail, augmentation des cadences… l’explosion du tourisme à Marseille a nécessairement des répercussions sur le travail des femmes de chambre ! Pourtant, l’augmentation de la fréquentation de l’hôtel et l’inflation que subissent les salariées, ne conduisent ni l’une ni l’autre à des augmentations de salaire !”. Le jour même, les grévistes obtiennent dès cet été, comme leurs collègues directement employés par la chaîne hôtelière, une prime (incluant les cotisations sociales) qui permettra de compenser l’inflation 2022. Une négociation devra se tenir en octobre pourque la prime de fin d’année qui avait déjà été obtenue auparavant par l’action syndicale soit revalorisée. Actuellement équivalente à 60% d'un 13ème mois, elles exigent qu’elle soit portée à 100 %. L’action va non seulement bénéficier aux personnels de la société PRIMIUM sur les hôtels mobilisés mais aussi aux collègues des Adagio Prado Perrier et Timone inclus dans l’accord. Un bel exemple de lutte gagnante à imiter dans ce secteur de bas salaires et de conditions de travail déplorables.

Entrepôt Amazon à Nantes-Carquefou : Ce 16 août, les salariés de Fast Despatch Logistics, livreur sous-traitant qui n’a qu’Amazon comme client, ont enfin reçu leur paye de juillet. Depuis, ils bloquent le dépôt et ne laissent plus passer les camions de livraison. Le même jour, la responsable prévenait que le salaire d’août risquait de subir aussi un gros retard, identique à celui de juillet. Manœuvre pour inciter ses livreurs à démissionner avant la liquidation judiciaire ? Car la cadre écrit également que la procédure qui libérera les collaborateurs de tout lien avec Fast Despatch Logistics pourrait durer « au moins trois ou quatre mois». Manœuvre pour inciter ses livreurs à démissionner avant la liquidation judiciaire ? « Les employés ont eu des appels de la direction de Fast Despatch pour les pousser à la démission », confirme Erwan Praud, secrétaire général de la CGT transports des Pays de la Loire. Mais parmi les quatre-vingts salariés du site de Carquefou, aucun n’envisage de démissionner. « On s’est promis d’être ensemble, solidaires. On ne va pas lâcher, car on n’a rien à perdre. » Alertés par la CGT, mercredi 17 août, les inspecteurs du travail de Villepinte (où se trouve le siège social de la société en faillite), ont fait un signalement au procureur de la République de Bobigny, compétent pour la zone. Lequel procureur va saisir le tribunal de commerce de Bobigny pour que la liquidation judiciaire de l’entreprise soit engagée. Sans cette procédure, les salariés ne peuvent pas chercher du travail ailleurs. D’où la poursuite nécessaire de la lutte avec l’objectif de faire pression sur Amazon, pour que ce donneur d’ordre négocie avec son ex-sous-traitant. Attisant la colère des salariés, une camionnette a forcé le blocage, roulant sur le pied de l’un deux. Le mouvement ne prend pas le chemin de l’apaisement. La sous-traitance qui se développe à l’infini est un moyen supplémentaire d’exploiter plus et mieux les travailleurs, qui ne s’y trompent pas.

Etex à Mazan Vaucluse : Les salariés de cette entreprise de plaques de plâtre sont en grève depuis le 26 juillet (voir. hebdo 781) et restent toujours aussi mobilisés. Ils réclament 100 euros d’augmentation de leur salaire. La direction refuse, elle a dû mal évaluer le niveau de leur détermination. Comme si elle n’avait pas entendu leur message « ça dure mais on n’a pas le choix ». En effet, selon le délégué CGT, Rémy Julien. "Les gens ont peur pour leur avenir, pour leurs salaires, pour leur vie personnelle parce qu'ils n'arrivent plus à finir le mois, expose-t-il. On ne voulait pas lâ cher et on ne lâchera pas. Ce n'est pas normal de nos jours de devoir choisir de payer la cantine de son enfant ou de manger le midi, alors que l'entreprise fait 35 à 40 millions d'euros de résultats nets par an. Donc on a fait les comptes et on demande juste ce qui nous est dû". La modestie de la revendication à 100 euros souligne bien l’ampleur de l’angoisse des longues fins de mois : « c’est peu sur une fiche de paie mais c’est déjà bien » estime l’un d’eux, face à une direction que tous jugent « méprisante ». Le mouvement qui touche un tiers des 66 salariés n’est pas près de s’arrêter tant leur situation est littéralement invivable. Une caisse de grève a été lancée et rencontre l’estime de la population, des salariés du secteur et des passants de plus en plus nombreux.

Un peu partout, les grèves dans les transports en commun bloquent des villes tous les week-ends : Paris et l’Ile de France, Dijon, le Mans etc. Une revendication commune : augmentation des salaires à la hauteur de l’inflation. Les primes et « primettes » aux montants dérisoires annoncées pour faire face à la rentrée ne suffiront pas tant le quotidien des salariés est invivable. Mais pour les patrons du CAC 40, ça va très bien, (voir hebdo 782).

Iberdrola Energie : Dans la presse du 19 août, l’électricien espagnol, le plus important concurrent d'EDF en France, conseille à ses clients de changer de fournisseur. "Nous vous invitons à changer de fournisseur (...) Si vous ne le faites pas, vous risquez une interruption de votre alimentation en électricité dès la fin de votre contrat avec Iberdrola". Entre 400 000 et 500 000 clients avaient contracté un abonnement à la concurrence de l'électricité édictée par Bruxelles et les chefs de gouvernements ou d'états de l'UE du capital. Le diktat de la Commission européenne était clair : plus de monopole national de l'énergie dans tous les pays de l'UE, ouverture du marché à la concurrence, EDF sommée de vendre l'électricité qu'elle produisait à bas prix à des sociétés privées qui ne produisaient rien (dont Iberdrola), mais qui au passage la revendaient avec du profit. Depuis EDF a été scindée en filiales et cotée en Bourse. Aujourd'hui, Macron parle de renationalisation d'EDF. En créant une SA -pas un établissement public industriel et commercial EPIC) - et sans mettre filiales ou sous-traitants dans la loi.

Dans le monde
Le Royaume-Uni connaît, depuis le début de l’été, une impressionnante vague de débrayages massifs, de grèves touchant notamment les transports, la poste, les ports, la santé et de très nombreuses entreprises. Les négociations avec la multitude d'opérateurs ferroviaires privés du secteur sont dans l'impasse, selon les syndicats. Ces derniers ont par ailleurs rejeté une offre de hausse salariale de 8 % sur deux ans de Network Rail, entreprise publique de gestion des lignes ferroviaires, qu'ils accusent d'être conditionnée à des licenciements massifs. Le ministre des Transports Grant Shapps, accusé par les syndicats de bloquer la situation, reproche de son côté aux organisations syndicales de refuser des réformes pour moderniser le rail. Il pourrait passer en force, a-t-il assuré vendredi sur Sky News. "Si nous ne pouvons pas mettre en place ces modernisations, nous devrons (les) imposer" a-t-il dit. Les dockers du port de Felixstowe (est de l'Angleterre) – le plus gros pour le fret dans le pays – démarrent à leur tour une grève de huit jours, menaçant de mettre à l'arrêt une grande partie du trafic de marchandises du pays. Postiers, employés de l'opérateur télécoms BT, manutentionnaires d'Amazon, mais aussi avocats pénalistes ou éboueurs ont également débrayé ou prévoient de le faire. Les mouvements pourraient durer au-delà de l'été, et se propager aux fonctionnaires de l'enseignement ou encore de la santé. Partout dans le pays, le mot d'ordre est le même : les employés réclament des revalorisations de leur paie en phase avec l'inflation, qui a atteint en juillet 10,1 % sur un an et pourrait dépasser 13 % en octobre.
Les grévistes ont le soutien actif du public. Il est derrière les travailleurs et organise en même temps des centaines de milliers de Britanniques qui menacent, avec le mouvement « Don’t Pay » de ne plus payer leurs factures d’électricité. La réponse du capital sera-t-elle « à la Thatcher » ? ce n’est pas impossible sauf si le mouvement s’approfondit et se généralise.

Les émeutes de la faim ne relèvent plus d’un spectre, elles sont là 
« Je pense qu’il y a une forte probabilité que nous ayons une déclaration de famine » dans les semaines à venir, a déclaré M. Beasley, chef du Programme Alimentaire Mondial vendredi 19 août, depuis le nord du Kenya qui subit une terrible sécheresse comme toute cette région d’Afrique. Au Kenya mais pas seulement. La faim qui était déjà en hausse régulière ne cesse de croître avec la guerre en Ukraine (voir hebdo761). La liste est longue mais le silence qui entoure ce drame et ses causes est impressionnant. Quelques communications commencent à pointer avec des considérations sur des causes naturelles, climat, sols, ou démographique mais jamais le vrai responsable : le capitalisme avec tout ce qui lui est inhérent : la colonisation, la financiarisation de l’agriculture, la spéculation folle sur les matières premières et en particulier les céréales. L’exemple de l’errance du cargo Razoni à la recherche du « mieux disant » a jeté une lumière crue sur les réalités du commerce mondial. Le critère de l’urgence liée à la famine n’appartient pas à la logique capitaliste. Pourtant, la liste des pays concernés par la famine et les colères qu’elle suscite est longue, trois exemples pour éclairer notre propos.

Au Soudan : des milliers de Soudanais défilé le 11 août dans les rues de Khartoum pour exhorter les militaires, à la tête du pays depuis le putsch d’octobre, à retourner dans leurs casernes et pour réclamer de meilleures conditions de vie. « Les militaires dans leurs casernes », « la sécurité », ou encore « la santé et l’éducation gratuites », scandent les protestataires. Les partisans d’un pouvoir civil au Soudan manifestent chaque semaine depuis le coup d’Etat du 25 octobre du général Abdel Fattah al-Burhane, malgré une répression féroce. Au-delà de l’aspect politique, la révolte dans ce pays déjà un des plus pauvres du monde, s’enracine dans la présence permanente de la malnutrition et de la faim. L’inflation y avoisine les 200%, la monnaie est en chute libre et e prix du pain a été multiplié par dix. Un Soudanais sur trois a besoin de l’aide humanitaire.
En Sierra Leone : le 11 août la police a tiré à balles réelles sur les participants à une manifestation contre la cherté de la vie. L’initiative de la manifestation est venue d’un groupe de femmes commerçantes qui a convoqué un « rassemblement pacifique » pour « attirer l’attention sur les difficultés économiques et les nombreux problèmes qui affectent les femmes de la Sierra Leone ». Six morts et des dizaines d’arrestations. Le président Julius Maada Bio a accusé l ’opposition d’avoir voulu créer une insurrection pour renverser le gouvernement. Malgré un sous-sol qui regorge de diamants, ce pays reste u des moins développés au monde.

Au Ghana : le 4 août, plusieurs milliers de manifestants étaient dans les rues d’Accra ce mercredi pour contester l’action du gouvernement ghanéen. La colère des habitants est particulièrement attisée par la hausse des impôts et du prix du carburant. L ’inflation s’est accélérée pour atteindre 28 % en mai. Ce même mois, l’inflation générale a été alimentée par la hausse des cours des produits agricoles, ainsi que celle des prix des transports et des logements. Les prix des produits alimentaires ont augmenté de 30,1 %, les huiles et les graisses, l’eau et les produits céréaliers ayant connu la plus forte envolée cette année. Environ un cinquième des céréales du Ghana proviennent de Russie, ce qui a fait grimper en flèche les prix des produits de base mondiaux le blé et le pétrole. La semaine dernière, l’Agence française de développement (AFD) et la Ghana Commercial Bank (GCB) ont signé un accord pour fournir des prêts bon marché et des subventions. Une facilité de crédit de 13 millions d’euros et une subvention d’1 million d’euros seront mobilisés auprès d’acteurs privés œuvrant dans les domaines de l’efficacité énergétique et le renouvelable les affaires continuent sereinement pour le plus grand profit des vautours des multinationales.

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